Une violente polémique se tient entre S. Harnad et G. Eysenbach à propos des citations des articles en libre accès. L'affaire est partie d'une étude du second qui confirme le fait que les articles en accès libre sont plus cités (v. par ailleurs la bibliographie faites par l'Open citation project sur le sujet) et surtout d'un éditorial de PLoS qui insinuait que les articles des revues en libre accès ("gold journals") étaient plus cités que les articles archivés par les auteurs des revues en accès limité ("green journals").

Au-delà de la violence des propos et du caractère anecdotique des relations entre chercheurs, il y a plusieurs leçons à tirer pour l'économie du document :

1) Les conflits d'intérêts ne sont pas absents du monde des archives ouvertes, qui se définit comme un monde ouvert. Ils sont politiques (au nom de l'intérêt général de la science), ou même politiciens (confusion entre les positions personnelles ou de groupes et l'intérêt général). Ils se règlent par un argumentaire scientifique ou se voulant tel, mais en réalité la passion est sensible à chaque ligne. Les scientifiques sont mis en abîme dans cette affaire (ils se regardent travailler et analysent leur propres pratiques avec leurs propres outils) et leurs egos sont forts. C'est un peu comme lorsque les médias enquêtent sur les médias.

2) La notion de publication se précise et ce n'est pas trop tôt. La publication n'est pas la mise en publicité, ni la validation (révision par les pairs), mais aussi la promotion de l'accès ou, disons, la mise en visibilité. Dans ce processus, le rôle des revues, comme instrument de marketing, n'est pas négligeable et souvent mal compris par les scientifiques qui ne pensent qu'au facteur d'impact. Inversement, le "darwinisme" documentaire (voir Roger) joue maintenant à plein sur le Web et Dorothea Salo a raison de noter que les revues sont moins utiles pour les chercheurs confirmés (sauf sans doute ceux qui visent le prix Nobel ;-) que les archives. Ils n'ont besoin pas de reconnaissance (dans les deux sens : réputation et repérage), par contre la fluidité et la vitesse des échanges leur importent plus. Leur collège invisible fonctionne à plein.

3) Il reste une certaine confusion, justement sur les techniques Web de mise en visibilité /OA. Si un site ou une page sont d'autant plus visibles qu'ils sont consultés ou pointés, alors il y a clairement concurrence et non complémentarité entre archives et revues en ligne. En effet par exemple, un auteur de réputation qui met son article sur une archive ouverte va augmenter le pagerank de celle-ci au détriment de celui du site de la revue où il est publié. Sauf erreur de ma part, ces questions là n'ont pas été étudiées.

Sources P. Suber, Marlène