Pour faire branché aujourd'hui, il faut dire que le Web 2.0 est une «conversation». On signifie par là qu'il ne s'agit plus d'un média de masse comme les journaux ou la radio-télévision où un émetteur s'adresse à une multitude de récepteurs passifs, mais de systèmes permettant une participation active simple des lecteurs.

On oublie, alors, que les médias de masse à leur origine étaient des «lettres» ou des «émetteurs-récepteurs» et qu'inversement nombreux sont les symptômes d'une reconstitution de gatekeepers au sein du dit Web 2.0 dans une évolution comparable de la communication flottante.

Mais, il me semble que l'essentiel est ailleurs, il y a bien une différence radicale avec la période précédente qui pourrait s'énoncer comme un paradoxe, appelons-le «le paradoxe de Roger», car il m'a été inspiré par le Roger 3 et les discussions sur la liste du RTP-DOC :

Le Web favorise conjointement deux mouvements opposés : le développement d'échanges spontanés (conversations) et leur fixation sur un support public, pérenne et documenté.

Autrement dit, le Web transforme automatiquement ce qui relevait de l'intime et de l'éphémère en document ou proto-document. Ainsi la rupture platonicienne entre la parole et l'écrit, qui avait déjà été passablement assouplie par l'enregistrement du son et le téléphone, est une nouvelle fois déplacée.

Il me semble que ce paradoxe éclaire, avec celui de Muet-Curien (v.p.37), bien des développements actuels et des hésitations dans les analyses et stratégies.