Solidités et fragilités de l'économie des moteurs
Par Jean-Michel Salaun le samedi 17 juin 2006, 11:59 - Moteurs - Lien permanent
Quelques informations ou études récentes peuvent être mises en écho pour s'interroger sur l'économie future des moteurs :
- J.-M. Le Ray signale et traduit un intéressant billet de Vinny Lingham intitulé The Future of Search Engines ?
- Chris Amstrong met en parallèle deux études convergentes, l'une du JISC, l'autre d'OCLC qui montrent que les étudiants préfèrent massivement les moteurs à toutes les autres ressources documentaires proposées par les bibliothèques.
- Yahoo! s'allie avec eBay et élargie ainsi considérablement sa force de frappe commerciale et, par ailleurs, lance en France, après l'Australie, le Canada, l'Inde, le Royaume-Uni, les US, où il est devenu un véritable phénomène, son système de Questions/Réponses, basé sur l'entraide des internautes.
Quelques remarques contradictoires inspirées par ces nouvelles :
1) Si l'économie des moteurs reste basée sur la publicité, il lui faudra trouver une mesure consensuelle de son marché pour se consolider. C'est, à mon avis, l'enjeu principal des remarques de V. Lingham, qui propose une solution alternative au nombre de clics. Compte tenu de l'ampleur de la montée du marché publicitaire sur le Web, le débat est de taille. Il est vraisemblable qu'il faille un tiers extérieur pour construire cette mesure, car chaque acteur a tendance à la tordre à son profit et la confiance indispensable pour l'organisation d'un marché ne peut alors s'intaller durablement. Si cette hypothèse est juste, alors le système des enchères sur Google ne serait qu'un moment de l'économie du Web, illustrant une position hégémonique sur un marché non stabilisé plus qu'un modèle d'affaire durable.
2) Dans le domaine documentaire, la place prise par les moteurs en quelques années est très impressionnante. Il ne faut pas sousestimer l'inertie d'une telle tendance. L'influence du Web 2.0 (Blogs, fil RSS, tags etc.) est peut-être ici bien moins importante que ne le croient les observateurs du Web, fascinés à juste titre (mais en même temps aveuglés) par l'efficacité des outils qu'ils utilisent eux-mêmes. La loi du moindre effort conduit l'étudiant à l'outil le plus simple et le plus connu. L'objectif n'est pas le meilleur résultat mais le meilleur rapport résultat acceptable/énergie dépensée. Pour le domaine documentaire qui n'engage pas de transaction monétaire de l'utilisateur, les places prises seront difficiles à modifier.
3) Néanmoins, la fin du PageRank, prophétisée dans le billet de V. Lingham, peut-être aussi mise en écho avec le nouveau service proposé par Yahoo! qui semble inspiré de Wikipédia dont le succès foudroyant dans le domaine documentaire ne doit pas non plus être sousestimé.
Commentaires
Bonjour,
Merci de me citer et d'évoquer le billet de Vinny Lingham.
Concernant l'émergence du coût par action prévue par Lingham, certains observateurs anglo-saxons ont remarqué que le lancement de checkout va dans ce sens ( voir gigaom.com/2006/06/29/why... ou www.internetnews.com/ec-n... ), ce qui est sûr c'est qu'avec la probable montée en puissance de ce dernier service, à l'avenir un internaute qui voudra acheter un produit sur le Web et qui aura le choix entre un site certifié par Google et l'autre pas, il y a de grandes chances pour qu'il choisisse le premier sans trop se poser de question.
Maintenant concernant le service de Yahoo inspiré de Wikipédia, n'oublions pas que dès le mois de mars, dans sa présentation aux analystes financiers, Eric Schmidt annonçait vouloir piloter l'innovation dans la recherche, ce qui signifiait, entre autres : "appliquer l'expérience Wiki à la recherche, en habilitant les utilisateurs/experts à améliorer les résultats dans leur propre domaine d'expertise, pour ainsi créer des millions de pôles de compétences verticales : adscriptum.blogspot.com/2...
(Wiki of search: empower users/experts to improve search results in their domains of expertise — create a million verticals).
Donc même si Google n'a pas encore développé une solution de ce genre, on peut d'ores et déjà être certains que c'est dans les cartons...
Cordialement,
Jean-Marie Le Ray