Dans le domaine de la publication scientifique traditionnelle, les revues, une récente enquête de l’ALPSP (résumé) ne laisse aucun doute sur l’ampleur de la redocumentarisation. Ses résultats principaux, tels qu’ils figurent dans la présentation méritent d’être cités in extenso :

« - Les éditeurs continuent à rendre accessible en ligne plus de contenus, 90% des revues sont maintenant en ligne contre 75% en 2003 (note JMS : l’échantillon comprend 174 éditeurs commerciaux ou non qui publient des revues de langue anglaise).

- Le nombre de revues continue de croître. 174 éditeurs ont lancé 1.048 nouvelles revues dans les cinq années précédant 2005, soit une moyenne de 6,02 titres par éditeur, pendant qu’ils fermaient 185 titres, moyenne 1,06 chacun.

- la disponibilité en ligne des numéros anciens a cru de 5 à 91% en 1991. De nombreux éditeurs ont numérisé leur collection depuis le premier numéro ; 47 offrent l’accès libre au contenu antérieur à 1990. La continuité de l’accès suivant l’antériorité de l’abonnement est proposée par environ 60%. L’accès aux numéros antérieurs est devenu une part du produit en ligne ; 63% des éditeurs le proposent aux abonnés sans coût supplémentaire.

- Environ un cinquième des éditeurs tente des expériences avec des revues en libre accès.

- La soumission d’articles et la révision par les pairs directement en ligne ont été largement adoptées ces cinq dernières années.

- Presque tous les éditeurs offrent plus de contenus à plus de lecteurs au travers de ventes groupées et/ou de contrats avec des consortiums (JMS : de bibliothèques) ; les calculs de tarifs varient considérablement ; et de nombreux petits éditeurs sont maintenant inclus dans des regroupements multi-éditeurs comme l’ ALPSP Learned Journals Collection.

- Tous les éditeurs ont maintenant élargi les droits d’usage aux lecteurs des bibliothèques (library friendly).

- Même si la plupart des éditeurs demandent aux auteurs de céder leurs droits. La proportion de ceux qui acceptent une licence pour publier a augmenté significativement ces deux dernières années. »

L’ampleur du changement se passe de commentaire. Pourtant, il ne représente qu’une part des transformations en cours, la part la plus traditionnelle, celle qui montre l’adaptation très rapide des acteurs anciens de la publication scientifique : les éditeurs (savants ou commerciaux) et leurs clients les bibliothèques. Bien de nouveaux acteurs sont venus bouleverser les conditions de la publication de la science, et les résultats précédents ne sont peut-être qu'une réaction défensive face à ceux-là : les scientifiques eux-mêmes d’abord par le mouvement du libre accès ou des archives ouvertes ont pris en main la diffusion directe de leurs travaux ; les promoteurs de ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui le Web 2.0, mélange d’internautes éclairés et d’informaticiens militants ou entreprenants, qui construisent ou proposent collectivement un savoir partagé ; des industriels enfin, et tout particulièrement les responsables des moteurs de recherche dont le succès commercial tranche radicalement avec les déconvenues financières du Web pourtant toutes récentes.