Donc, tout le monde s'extasie sur l'explosion des réseaux sociaux, et certains prétendent même qu'ils sont à l'aube d'une nouvelle étape, plus explosive encore en Asie. On trouvera une bonne synthèse des différentes analyses chez Olivier. F. Pisani a aussi présenté une série de billets intéressants sur Facebook. En anglais, parmi une multitude d'autres, on trouve bien des réflexions stimulantes sur le blog ''Many2Many''.

Le succès mesuré en terme de fréquentation est en effet impressionnant en chiffres absolus et en rapidité d'évolution. Néanmoins, ce succès public a-t-il son pendant économique ? Il est trop tôt, sans doute, pour répondre et les chiffres ici sont encore hasardeux. Beaucoup néanmoins y croient. Je suis plus circonspect, le modèle d'affaires ne me paraît pas très clair.

Grâce à Jean-Daniel Zeller (merci à lui !), j'ai pu parcourir le premier document d'une série à venir sur les réseaux sociaux par Forrester Research : Charlene Li, How Consumers Use Social Networks, Interactive Marketing Professionals, June 21, 2007.

Voici sa conclusion, qui n'est pas sans rappeler une autre étude du même genre déjà citée sur ce blogue (trad JMS) :

Le marketing sur les réseaux sociaux doit se réorienter

Avant de plonger la tête la première dans les réseaux sociaux, les professionnels du marketing doivent se demander comment approcher la communauté, tout particulièrement ses usagers réguliers et importants qui sont les plus susceptibles de répandre viralement leur enthousiasme pour un nouveau produit ou service. Comme étude de cas, il faut observer Victoria’s Secret dans la campagne de PINK®, qui a réussi avec son approche fine des réseaux sociaux. Les professionnels du marketing doivent :

  • Rompre avec les tactiques traditionnelles du marketing. Pour être présents sur les réseaux sociaux, ils importent souvent ce qu'ils considèrent comme les éléments les plus novateurs de leur Site Web - vidéos, jeux en ligne et concours interactifs. Mais sur un réseau social, ces éléments peuvent tomber à plat ; comme cela a été dit, l'usager d'un réseau social veut participer à une conversation ou bâtir une relation, et ne pas rester spectateur sur le bas-côté. Le Victoria’s Secret a utilisé sa présence sur Facebook et MySpace pour encourager les usagers à discuter de leurs dernières offres en lingerie, mettre en ligne des photos, télécharger des environnements et des logos sur leurs propres pages pour favoriser la diffusion virale de la campagne.
  • Favoriser les relations amicales. À première vue, il peut paraître ridicule de devenir un « ami » d'une marque - après tout l'amitié concerne les relations entre les personnes, pas vraiment entre une personne et une société commerciale. Mais les pages de marketing sur les réseaux sociaux peuvent être un endroit où des amis construisent une forte relation avec la marque. Par exemple, le profil du Victoria’s Secret de PINK avait 203.000 amis sur MySpace et 314.000 membres sur Facebook fin mars 2007. Cela signifie que le logo de PINK apparait sur plus de 500.000 profils, qui suggèrent à leurs amis de cliquer dessus et de visiter la page du profil du Victoria’s Secret.
  • Renouveler régulièrement le contenu. Comme dans toutes relations, les même sujets de conversations à table sont vite éventés. Les professionnels du marketing doivent avoir une stratégie pour motiver leurs plus fervents fans - quelles interactions, contenus et dispositifs feront que les usager reviendront encore et encore. Dans le cas du Victoria’s Secret, le dispositif actualise le profil, avec les produits, les promotions, aussi bien que les photos de célébrités prises dans les dernières réceptions de PINK.

Pour ceux qui ne connaissent pas Victoria’s Secret, voici une vidéo : du vrai glamour Yankee, très marqué par une esthétique américaine James Bond Girl, pas vraiment ma tasse de thé, mais cela marche au moins de ce côté de l'Atlantique ! Le sujet explique sans doute une partie du succès, on n'imagine pas le même buzz avec une marque de boites de cassoulet..

Mais ma question est celle-ci : même si on peut imaginer toute sorte de bricolages pour rémunérer une communication virale, fondamentalement, celle-ci doit rester gratuite. Dès lors, comment peut-on construire un modèle d'affaires solide sur ces pratiques qui contredisent l'organisation économique classique de la publicité, où le principe est de payer pour un espace publicitaire ? Il me semble plutôt que ces plate-formes ont vocation à être rachetées par des firmes qui, elles, maîtrisent la régie publicitaire des sites profitant de l'augmentation générée du trafic.

Ce questionnement n'est néanmoins valable que dans le cas où les identités des participants restent virtuelles. La Corée nous offre un contre-exemple de réseau social, très rentable lui, où les participants sont clairement identifiés et donc les transactions peuvent être payantes.. et les usagers plus âgés. Si on fait un petit retour en arrière, le minitel en France présentait les mêmes qualités économiques.