Suite à une question posée dans un commentaire récent de Damien Belvèze sur un ancien billet, voici quelques précisions sur le fonctionnement de la récolte de fonds dans les bibliothèques universitaires de Montréal. J'ai recopié simplement des extraits d'un article sur le sujet, grâce à la complicité de son auteur.

Guisset M., Canada : L'argent privé des BU, Livres Hebdo N 688 du 4 mai 2007.

Les dons se montent à environ 7 millions de dollars canadiens (4,6 millions d’euros) pour la bibliothèque de McGill, contre 350000 dollars côté université de MontréaL Ils représentent 22 % du budget de fonctionnement des bibliothèques et permettent en outre l’achat de livres ou de matériel informatique. Le poste de la directrice lui-même est financé par un legs d’une ancienne bibliothécaire, complété par la famille afin de fonder la première chaire dotée du Canada à l’intention d’une bibliothèque universitaire. Une partie des fonds récoltés est placée: entre 22 et 23 millions de dollars (14 à 15 millions d’euros) pour les bibliothèques de l’université McGill, autour d’un million (650000 euros) pour celles de l’université de Montréal. (..)

L’université McGill collecte des fonds auprès d’un réseau mondial de 174000 anciens diplômés, mais aussi auprès des parents des diplômés et également auprès des étudiants. « Tous les étudiants ont accepté de verser 5 à 6 dollars en plus de leurs frais d’inscription, affirme Janine Schmidt, directrice des bibliothèques. Ils sont très impliqués et décident de l’affectation de cet argent. Nous avons de la chance, car ces trois dernières années, ils ont favorisé les bibliothèques.»

Note JMS : l'argent des étudiants a notamment été affecté à l'ouverture de nuit de la bibliothèque pendant les périodes d'examen. Comme des étudiants sont recrutés pour cette tâche, c'est du win-win, comme on dit à McGill.

De juin 2005 à mai 2006, 3800 personnes ont fait des dons pour les bibliothèques de McGill, 1700 pour celles de l’université de Montréal. Les dons sont de toutes sortes: espèces, valeurs mobilières, titres, obligations, police d’assurance-vie, legs testamentaires... Paradoxalement, ce sont les dons en nature — livres, collections, documents divers — qui sont les plus problématiques car ils présentent souvent peu d’intérêt pour les collections existantes et leur évaluation a un coût.

La collecte de dons, pratique typiquement nord-américaine, peut s’analyser comme une orientation volontaire des subventions publiques par le donateur privé. Son don lui procure, en effet, un avantage fiscal d’environ 50% du montant. Parfois, si le don est habilement planifié, l’avantage peut être bien supérieur. Compte tenu de l’évolution démographique et des richesses accumulées par les jeunes retraités, les années à venir pourraient accentuer la tendance.

Documentation Université McGill

J'ajoute que la tradition de récolte de fonds est nord-américaine anglophone, très ancrée dans l'esprit américain et initiée par l'appel à la philanthopie d'Andrew Carnegie qui a financé plus de 2500 bibliothèques dans le monde au début du XXème siècle. À ma connaissance on ne trouve pas son équivalent au même volume ailleurs. Celle-ci est bien expliquée dans le livre :

Martel Frédéric, De la culture en Amérique, Gallimard 2006, 614p.