Ce billet a été rédigé par Jérémie Pernet, étudiant de l'École de bibliothéconomie et de sciences de l'information dans le cadre du cours Économie du document.

Dans le monde dynamique et mouvant des réseaux sociaux, plusieurs questions reviennent constamment. L’une d’elles concerne le nerf de toute guerre, je veux bien sûr parler de l’argent. Plusieurs faits le prouvent. Tout d’abord l’introduction de Microsoft dans le capital de Facebook avec un investissement de 240 millions de dollars (1.6% du capital de la plateforme de réseau social selon le Journal du Net, mais ce chiffrage est discutable ici) qui lui permettra de gérer la régie publicitaire des espaces en vente sur Facebook comme on pouvait s’y attendre ().

Comment le célèbre éditeur est-il sûr que les perspectives de revenus publicitaires sur Facebook (qui n’est toujours pas rentable à l’heure actuelle) valent un investissement de plusieurs centaines de millions de dollars ? Il est vrai que la croissance exponentielle des utilisateurs de Facebook et les nombreuses opportunités qu’offrent les externalités de réseau sur la plateforme peuvent faire rêver les investisseurs. Cependant les raisons du départ de Dustin Moskovitz (co-fondateur du réseau, ce qui fragilise ''Facebook'') pour se consacrer à un autre projet web 2.0 orienté vers le monde professionnel suscitent quelques interrogations. Envisage-t-il que les réseaux sociaux orientés vers les professionnels sont plus rentables que les plateformes généralistes ?

Ce qui reste sûr, c’est que Facebook peine encore à trouver un modèle d’affaires, ou alors cache très bien son jeu. Pour y voir plus clair, un article écrit par un collectif de chercheurs d’Orange Labs donne les fondamentaux de la monétisation de l’audience du web 2.0.

Ainsi, il apparaît que Facebook utilise la publicité traditionnelle payée au clic, la vente de biens virtuels et s’efforce en parallèle de concocter une forme de publicité qui insère les annonceurs à ses groupes d’utilisateurs, par le sponsoring par exemple. Ce nouveau modèle qui se veut l’avenir de la publicité 2.0 n’évite cependant pas toutes les problématiques inhérentes à la philosophie formulée par Tim O’Reilly. En effet, les gages de participation libre, d’indépendance et de transparence dans l’utilisation des données personnelles sont remis en cause par le traitement mercantile des interactions créées par les réseaux sociaux.

Est-ce bien différent sur les plateformes de réseaux sociaux professionnels ? Une petite analyse comparée des deux géants dans leur domaine (Facebook d’un côté et LinkedIn de l’autre) peut éclaircir la situation.

LinkedIn offre une plateforme qui permet les contacts liés aux affaires. Fondée sur des logiques d’expertise et des critères sérieux, la plateforme offre un environnement propice à l’échange et au contact actionnable, c'est-à-dire des interactions supposées engager des relations stables, basées sur les intérêts des membres et la confiance. Les communautés qui y sont créées sont d’ailleurs plus sélectives et favorisent le sentiment d’appartenance et donc la fidélisation des utilisateurs à la plateforme. Il est clair que de ce point de vue, Facebook pourrait pâtir de ses applications gadgets (envoi de cadeaux comme des oursons en peluche virtuels…) et de ses groupes « totalement inutiles » comme ils sont d’ailleurs catégorisés sur la plateforme. Cependant, les avantages de LinkedIn peuvent aussi faire sa faiblesse. En effet, l’apparence sélective de la plateforme peut décourager une audience plus large de participer.

Finalement, on imagine que des stratégies de monétisation différentes peuvent améliorer la rentabilité de chaque type réseau. Néanmoins, il reste que cibler un public en amont d’une solution de réseau social est favorable à une meilleure rentabilité pour des raisons évidentes de marketing. La recette idéale reste encore un Graal pour les éditeurs de plateforme et les régies publicitaires du web 2.0.