À l'occasion de la préparation de la 13ème et dernière séance à venir du cours 2010 sur l'économie du document (ici), j'ai actualisé et ajouté une colonne à un ancien tableau que tous ceux qui ont participé à l'aventure de Roger Pédauque connaissent.

Pour les non initiés à la réflexion pédauquienne, tout est expliqué dans ce livre. On peut en consulter en ligne l'intro et les trois textes collectifs (1, 2, 3). Malheureusement tout le travail du RTP-DOC n'est plus accessible.

Problematique-doc-num.png

Je rappelle que les lignes représentent les trois dimensions constitutives d'un document selon les réflexions pédauquiennes.

  • La colonne Chercheurs liste quelques disciplines, sans souci d'exhaustivité ni d'exclusivité, qui, lorsqu'elles abordent la notion de document, privilégient plutôt l'une de ces trois dimensions.
  • La colonne Objet/résultats indique l'objet particulier sur lequel portent les principaux efforts de recherche
  • La colonne Étape/interrogation souligne l'avancement des travaux, mais aussi en italiques le principal dilemme.
  • Enfin la dernière et nouvelle colonne montre que des stratégies industrielles peuvent aussi se lire à partir de cette grille.

Il est utile de décrypter ainsi à partir des sciences de l'information les stratégies des principales firmes. On se rend clairement compte qu'elles ont choisi des «avantages concurrentiels» différents.

On peut aussi y lire une gradation de haut en bas : Apple et Amazon ont les stratégies les plus traditionnelles, celles qui se rapprochent le plus des industries anciennes où le document n'était pas isolable de son support. Google a utilisé le Web comme un seul texte, sans gros souci de son ordre documentaire, il a ainsi rebrassé les cartes en trouvant avec la vente de mots clés aux annonceurs une source de revenu cohérente et indépendante des supports. Facebook va encore plus loin en inversant la problématique : ce n'est plus l'ordre documentaire ancien, ni même le contenu qui prime, mais bien les lecteurs qui forment l'ordre et sont documentés en conséquence et pour lesquels les documents traditionnels ne sont que des objets de trocs parmi d'autres. Reste que Facebook n'a pas encore trouvé un modèle d'affaires vraiment en phase avec son fonctionnement.

Mais il faut, à mon avis, se garder de conclure à un sens de l'histoire où le dernier arrivé serait le plus à même de l'emporter. La notion de document est trop importante pour une société pour qu'elle ne soit pas réordonnée. Si l'on suit Roger : celui qui devrait l'emporter est celui qui arrivera le mieux à mettre en cohérence les trois dimensions.