Jean-Daniel Zeller, merci à lui, m'a signalé la sortie d'un nouveau rapport de l'OCLC qui mérite en effet qu'on s'y arrête :

Constance Malpas, Cloud-sourcing Research Collections: Managing Print in the Mass-digitized Library Environment (OCLC, Janvier 2011) ici.

L'ensemble est une étude chiffrée sur la possibilité d'externaliser la fourniture de documents pour les bibliothèques universitaires américaines dans le nouveau contexte issu de Google Book et l'HathiTrust. Extraits (les passages en italiques sont une traduction directe du résumé, le reste une synthèse rapide et très schématique de mon cru) :

L'objectif du projet était d'examiner la faisabilité de l'externalisation de la gestion des livres imprimés à faible utilisation dans les bibliothèques universitaires vers des fournisseurs de services partagés, y compris les larges collections d'imprimé et les dépôts numériques.

L'hypothèse suivante a fourni un cadre global pour notre enquête :

* L'émergence d'un corpus de masse de livres numérisés doit transformer l'activité de la bibliothèque universitaire, permettant une optimisation des collections imprimées patrimoniales qui augmentera sensiblement l'efficacité des activités des bibliothèques et facilitant une réorientation des ressources de la bibliothèque vers un portefeuille de services rénovés.

L'idée des responsables de bibliothèques universitaires nord-Américaines était de combiner 1) le dépôt géant de documents numérisés, HathiTrust, mutualisation des livres numérisés des bibliothèques par Google et récupérés par celles-là 2) avec des réseaux de fournitures de documents imprimés. Le premier permet de naviguer dans les livres et de repérer des éléments, sinon toujours d'avoir accès à l'ensemble du texte du fait du copyright, le second de se procurer le document imprimé si le besoin s'en fait sentir. De là, un certain nombre de questions de recherche ont émergé :

  • Quelle est la portée du corpus de la masse de livres numérisés dans la bibliothèque numérique HathiTrust et jusqu'à quel degré recouvre-t-il les collections imprimées conservés dans les bibliothèques de recherche universitaire ?
  • Le contenu du domaine public dans la bibliothèque numérique HathiTrust fournit-il un substitut approprié pour les collections imprimées à faible utilisation des bibliothèques universitaires ?
  • Y a-t-il recouvrement suffisant entre les collections partagées d'imprimés et la Bibliothèque numérique HathiTrust pour permettre à un nombre important de bibliothèques universitaires d'optimiser et de réduire les dépenses des opérations locales des imprimés ?
  • Quels gains opérationnels pourraient être obtenus par une externalisation sélective des activités de gestion des collections ?

L’hypothèse centrale a été confirmée avec succès : il y a suffisamment de matériaux dans le HathiTrust pour recouvrir une importante (et croissante) partie de la collection de pratiquement toutes les bibliothèques universitaires aux États-Unis, et il y a un chevauchement suffisant entre les dépôts numériques et les grandes collections imprimés pour autoriser un grand nombre de bibliothèques universitaires à reconsidérer leur gestion locale des imprimés. De plus, un nombre relativement restreint de fournisseurs de documents imprimés, y compris la Bibliothèque du Congrès, est suffisant pour atteindre plus de 70% de couverture de la collection de livres numérisés, ce qui suggère que le service partagé peut ne pas reposer sur un très grand réseau. La comparaison en terme de matière montre aussi que le HathiTrust est largement représentatif des collections des bibliothèques universitaires. Les livres en SHS constituent la majeure part des ressources numérisées, ce qui pourrait favoriser des disciplines jusqu’ici sous-représentées. De plus des économies substantielles pourraient être réalisées sur les espaces et les coûts de gestion.

Les principaux obstacles relevés sont les suivants :

  • La proportion des documents dans le domaine public est faible (16% des titres en juin 2010) et représente des matériaux peu largement représentés. Aussi, il y a peu d’économie à attendre de ce côté.
  • Aucun fournisseur de document imprimé ne peut prétendre pouvoir répondre à lui seul à la demande de chaque bibliothèque. Il faut donc envisager un réseau partagé de coordonné de fournisseurs.
  • L’absence d’un service robuste de découverte et de fourniture fondé sur une réserve collective d’imprimés est un obstacle pour changer la stratégie de gestion des imprimés, particulièrement pour les titres imprimés sous copyright.

C’est notre ferme conviction, fondée sur les conclusions ci-dessus, que les bibliothèques universitaires aux États-Unis (et ailleurs) doivent réunir les ressources et la volonté nécessaires pour mettre en œuvre une stratégie de transition pour maximiser les bénéfices des années d'investissement dans les collections d'imprimés tout en reconnaissant la bascule rapide vers la fourniture et la recherche d’information en ligne. Même, et peut-être surtout, avant tout résultat juridique sur le règlement Google Book Search, les bibliothèques universitaires ont une occasion unique de reconfigurer les chaînes d'approvisionnement des imprimés pour assurer une continuité pertinente. En l'absence d'une licence claire, l'accès en ligne à la plus grande part de la littérature rétrospective numérisés sera sérieusement entravée. La demande pour les versions imprimées des livres numérisés continuera d'exister et les bibliothèques seront incitées y répondre, mais elles devront le faire de manière plus rentable. En l'absence d’éditions en ligne totalement disponibles, l'indexation en texte intégral des documents numériques sous droits d'auteur fournit un moyen de modérer et de préciser la demande pour les versions imprimées et devrait faciliter le transfert d'une partie croissante des documents vers des entrepôts rationalisés. Vu sous cet angle, des dépôts d’imprimés partagés autoriseraient un changement significatif pour orienter les ressources de la bibliothèque vers un portefeuille de services plus pertinent pour l’institution.

Les économies annuelles réalisées seraient de 500.000 $ et 2 millions $ par bibliothèque de l'Association américaine des bibliothèques de recherche (ARL) , en fonction de la solution choisie.