Dérapages
Par Jean-Michel Salaun le jeudi 03 mars 2011, 07:09 - Web 2.0 - Lien permanent
L’Atelier de BNP-Paribas publie (ici) un petit billet sur la nouvelle opération spéculative dont on parle aujourd’hui. Prenant exemple sur l’opération lancée par la banque Goldman Sachs avec FaceBook (ici), une autre banque américaine JP Morgan cherche à investir dans Twitter. L’auteur du billet fait remarquer que dans ce cas les investisseurs de capital-risque sont court-circuités. Il conclut (trad JMS) :
Ce nouveau scénario a beaucoup de défenseurs, mais aussi certains contre. Que se passera-t-il si, comme beaucoup d’analystes commencent à le pointer, nous sommes au milieu d’une bulle géante pour les réseaux sociaux ? Bien, si les capitaux-risqueurs sont les principaux investisseurs, quelques gars riches seront moins riches. Mais si les sociétés d’investissement sont celles qui pilotent ces investissements, cela pourrait être bien pire.
Par ailleurs, FaceBook vient de lancer un nouveau système pour gérer les commentaires des sites web en les intégrant sur son réseau sans, comme toujours, demander l'avis des intéressés qui voient ainsi leurs données personnelles diffusées bien au delà de ce qu'ils avaient imaginé. L'objectif est évidemment d'augmenter l'audience et de phagocyter un peu plus le web. Mais, comme je l'ai déjà indiqué (là), cette augmentation de l'audience n'est pas proportionnelle à celle du chiffre d'affaires et pourrait s'apparenter à une fuite en avant.
Voici comment le journaliste de Libé conclut ironiquement son article (là) en faisant référence à la chaîne de TV française qui cherche actuellement des témoignages de « victimes d’internet » pour une énième émission sur les effroyables dangers de la Toile. :
Cher TF1, quand vous réaliserez le prochain épisode de Près de chez vous, grâce aux précieuses informations que vous venez de lire, n’oubliez pas de conclure que les ENNEMIS, les véritables DANGERS publics d’Internet, sont les esprits vicieux et maléfiques qui développent Facebook.
Du côté des bibliothécaires branchés, il est de bon ton de prôner sans le moindre recul un engagement fort sur FaceBook. Personnellement, je crois qu’il faudrait être plus circonspect. D'abord pour des raisons d’éthique, mais aussi de stratégie.
Actu du 10 mars 2011
Sur FaceBook, voir le point de vue critique mais nuancé de F. Cavazza ici
Actu du 20 mars
Sur l'entrée fracassante en bourse de Linkedln voir Business Insider ici
Commentaires
Votre dernier paragraphe m'intrigue.
Même les institutions les plus respectables telles les bibliothèques nationales, qui réfléchissent généralement longuement et sont prudentes quant aux implications sur la vie privée, se mettent maintenant à ouvrir des profils FaceBook.
Elles justifient leur démarche par des succès très rapides en terme de communication et de notoriété. Ainsi leurs prestations atteignent une nouvelle audience, ce qui réjouit également leurs tutelles. Elles tendent à considérer FaceBook seulement comme un outil parmi d'autres dans une sorte de lutte pour la présence sur la toile. La fin justifie les moyens...
Pourriez-vous nous éclairer, peut-être dans un prochain billet, en quoi FaceBook serait une erreur stratégique? Merci en tout cas pour vos contributions toujours stimulantes.
Bonjour Alexis,
Je n'ai pas écrit que les bibliothèques ne devaient pas ouvrir de profil FaceBook, mais plutôt qu'il fallait éviter trop de prosélytisme, pour deux raisons :
1. Ce réseau a un comportement contraire aux valeurs prônées par les bibliothèques et le minimum serait que ces dernières alertent leurs lecteurs, y compris pourquoi pas sur leurs pages FB. Il me paraît pour le moins déplacé que des bibliothécaires en fassent la promotion.
2. Même si le retour en terme d'audience peut être intéressant à court terme, trop d'engagement sur ce réseau n'est pas non plus forcément à moyen terme une politique payante. Les textes mis sur FB appartiennent à FB. Le retour en terme d'image n'est pas évident. L'énergie passée sur ce réseau pourrait s'envoler en fumée, si la firme change de politique ou tout simplement s'écroule, ce qui n'est pas exclu. De plus en plus de firmes privées s'interrogent, elles-mêmes, sur le retour sur investissement dans FB : http://www.michelleblanc.com/2011/0...
Donc, oui pour une position sur FB mais avec prudence, lucidité et sans y investir trop de temps. Est-ce que vraiment la fin doit justifier les moyens dans une mission de service public ? Pas sûr..