Zazie lit 1984 dans le métro de Montréal
Par Jean-Michel Salaun le mardi 12 juin 2012, 02:31 - General - Lien permanent
(Photo prise sur le web non créditée)
Témoignage lu ici :
Ma journée en prison pour avoir lu 1984 dans le métro
En ce dimanche 10 juin 2012, j’ai tenté de participer à une manif-action consistant à me déplacer pendant quelques heures du métro Berri au métro Jean-Drapeau en vue de manifester pacifiquement mon désaccord face au Grand Prix de Formule 1, évènement qui prône ce que je considère comme étant des idéologies sexistes.
Vêtue d’une robe fleurie et d’un sac rempli d’objets dangereux tels qu’une pomme, une bouteille d’eau et trois livres, j’ai voulu pointer du doigt la haute présence policière et l’attitude frôlant le terrorisme du SPVM depuis le début du conflit gouvernemental en lisant calmement 1984 de George Orwell, un roman d’anticipation présentant une société prise avec un régime policier totalitaire.
Après m’être faite fouiller par un policier à mon arrivée au métro Berri-UQAM, j’ai pris place dans un wagon en direction de la station Jean-Drapeau, mon livre à la main. Lors de mon retour vers le centre-ville, j’ai lu face à un policier et une femme a lu avec moi, par-dessus mon épaule. Nous avons été prises en photographie et le policier, voyant que nous étions deux dangereux personnages, a appelé son équipe en renfort pour nous accueillir en bonne et due forme à Berri. Avec les autres passagers du wagon, nous avons été placés face contre mur et nous avons ensuite été amenés à l’extérieur, par les sorties de secours, où on nous a dit de ne pas revenir sous peine d’être arrêtés. Aucune réponse lorsque j’ai demandé ce qu’il y avait de mal à lire dans le métro.
J’ai commis un acte irréparable de désobéissance civile en redescendant dans la station et en retournant lire dans un wagon. Lorsque les policiers m’ont vu manger ma pomme, ils m’ont crié qu’ils reconnaissaient mes tatouages et m’ont interceptée. J’ai demandé ce que j’avais fait de mal, autre que de lire pacifiquement, et j’ai eu pour réponse que j’avais désobéi à leurs ordres. J’ai reposé ma question, à savoir ce qu’il y a de mal à être dans le métro à lire, et je n’ai pas eu de réponse. On m’a mise en état d’arrestation et les deux policiers se sont fait un chaleureux high five pour se féliciter de leur bon travail. On m’a amenée, telle une criminelle, au centre de détention du SPVM au centre-ville de Montréal, où on m’a prise en photographie sous toutes mes coutures. Après avoir enregistré tous mes effets personnels, les policiers m’ont conduite à la cellule 52 où étaient présentes trois autres femmes. J’ai passé la journée derrière les barreaux, autour d’une toilette sale, couchée sur un banc, sans savoir quand j’allais être relâchée, pour avoir lu dans un wagon de métro et pour avoir récidivé à cet acte révolutionnaire. Vers 15h30, j’ai été libérée avec un constat d’infraction me disant que tout ce cirque avait eu lieu pour un refus de circuler.
État policier ? J’ai honte de mon Québec.
Marilyne Veilleux, étudiante à la maîtrise en sciences de l’information à l’Université de Montréal.
Sans doute, dira-t-on, elle a cherché la provocation cette nouvelle Zazie. Oui, évidemment. Mais la provocation révèle parfois d'inquiétantes dérives très éloignées de la tradition québécoise de tolérance comme le montre cet autre témoignage de journalistes.
Commentaires
Lu sur la page FB de Théâtre Péril, mardi 12 juin 2012 par Christian Lapointe :
"En allant assister à la période de questions à l’Assemblée nationale ce matin, comme il m’est arrivé de le faire plusieurs fois depuis le vote de la loi 78, le garçon à l’accueil m’a fait patienter sous des prétextes de problèmes de système informatique.
Après avoir attendu une douzaine de minutes, le chef de la sécurité du Parlement est venu me voir en m’interpellant à peu près de cette façon :
« Monsieur Lapointe, mon nom est ** de la sûreté du Québec. Nous voulons vous aviser que nous savons que vous avez, via Facebook, incité les gens à venir à l’Assemblée nationale pour assister à la période de questions. Y’a t’il d’autres personnes qui vous accompagnent aujourd’hui ? Vous savez que nous voyons à peu près tout ce qui se trouve sur Facebook ? » (...)
« Sachez que nous vous contrôlerons de la sorte à chacune de vos visites et que si vous enfreignez le code comportemental de l’Assemblée nous vous en interdirons l’accès pour toujours. »"
Incroyable ! Est-on vraiment au Québec ? Serai-je refoulé à ma prochaine traversée de l'Atlantique ?