Pour les moins familiers, la fin des années 1990 a été marquée par ce qu’on appelle la « bulle internet », une période pendant laquelle la valeur des actifs des entreprises des domaines de l’informatique et des télécommunications a été entretenue artificiellement par un excès de spéculation quant à sa valeur réelle. C’est l’époque pendant laquelle émergeront Google, Yahoo! Amazon et eBay.

Aux alentours du début des années 2010, le débat quant à l’existence d’une deuxième bulle internet battait son plein : le Web 2.0 était maintenant une expression courante; la technologie mobile nous permettait d’accéder du contenu et des contacts via une panoplie de services; Facebook, Twitter ainsi qu’une multitude de start-up étaient apparus dans l’espace de quelques années. Il se passait de quoi et toutes ces perturbations qui changeaient le tissu du Web m’interpellaient.

En tentant de comprendre la culture des start-up, je réalisais qu’une mutation se produisait sur plusieurs plans à la fois. En épousant des modèles d’affaires alternatifs, voire innovateurs, ces jeunes entreprises réussissent à révolutionner les façons de faire. Par exemple, l’application AirBnB permet à ses usagers qui cherchent un endroit à louer pour une période définie d’entrer en contact avec d’autres usagers qui sont désireux de louer leur espace. L’usage de cette application sociale a de véritables répercussions sur le marché de l’hôtellerie, particulièrement aux États-Unis.

Avec l’idée qu’il est possible de perturber des secteurs complets d’activités, je me suis demandé si les bibliothèques subissaient déjà de telles perturbations. Est-il possible qu’une perturbation plus profonde aille lieu ?

D’abord, le numérique bouleverse depuis déjà un bout de temps les bibliothèques ne serait-ce que concernant le prêt numérique. Le modèle d’affaires des bibliothèques est assurément déranger par les différents services qu’offrent Google (Books, Scholar, News) et Amazon (Kindle), notamment par l’accès de plus en plus facile à des livres et des articles tant en format papier que numérique.

Les articles de périodiques généralement disponibles à travers les services d’accès aux bases de données propriétaires qu’offrent les bibliothèques font également face à la popularité grandissante des dépôts numériques en accès libre.

Dans les start-up, les espaces de travail ont une importance assez marqué dans la culture d’entreprise. Récemment, l’aménagement de l’espace dans les bibliothèques est aussi l’objet d’une forme de réorganisation. D’ailleurs, on assiste actuellement, au Québec, à la construction d’espaces de collaboration ou de co-travail. Espaces temps, une entreprise sociale, qu’on pourrait qualifier de start-up, commence à se faire un nom au niveau de la conceptualisation de ce genre d’espace. Espaces temps a notamment collaboré à la mise en place de l’Espace 3C à la bibliothèque de l’École de technologie supérieure à Montréal.  

Enfin, un article a été publié dernièrement avec l’idée que les bibliothèques ont toutes les ressources nécessaires afin de jouer le rôle d’incubateur de start-up. De fait, plusieurs bibliothèques américaines ont fondé l’Alexandria Network qui se veut un réseau de bibliothèques pouvant favoriser le développement de start-up. On invoque même la démocratisation de l’entreprenariat.

Enfin, l’idée que j’aimerais vous laisser est celle de la perturbation non pas au sens péjoratif, mais au sens d’effervescence. Bien que les bibliothèques soient en quelque sorte victime de ces changements, il est souhaitable, selon moi, que celles-ci prennent une plus grande place sur ce plan, qu’elles deviennent de véritables vecteurs de changement.