17769
Par Jean-Michel Salaun le mercredi 03 juin 2009, 10:56 - Bibliothèques - Lien permanent
Voici le premier message envoyé le 17 septembre 1993 sur Biblio-fr :
Je le renvoie a toute la liste (i.e. a l'adresse biblio-fr@univ-rennes1.fr)
Nous devrions le recevoir tous les deux. Merci de m'ecrire directement un message indiquant que vous l'avez bien recu.
Herve Le Crosnier LeCrosnier@unicaen.fr
Ils étaient donc deux ce jour là. 17769, c'est le nombre d'abonnés (sousestimé, car je suivais par exemple la liste sans y être abonné par les archives) à ce jour, le jour de l'arrêt de la liste, annoncé par ses promoteurs, Hervé Le Crosnier et Sara Aubry. Sur l'importance de cette liste pour la profession, sur son intérêt, la page d'histoire écrite, je n'ai rien à ajouter à leurs explications données dans le dernier (provisoirement) message (ici), sinon un immense merci pour le travail accompli et l'énergie dépensée. Le bénéfice fut immense pour tous.
Mais tout de même, 17769 lecteurs spécialisés c'est un joli capital en terme d'économie de l'attention. Faut-il le jeter aux orties ? Sans penser évidemment à une exploitation commerciale totalement perpendiculaire au projet, ne peut-on pas imaginer une valorisation professionnelle d'un tel réseau de diffusion ?
Je blasphème ?
Commentaires
tout pareil ;-)
http://affordance.typepad.com/mon_w...
Oui, Jean-Michel, tu blasphèmes.
Très fort même, car justement nous avons refusé de jouer ce jeu de la "monétarisation" (fut-elle symbolique) de l'économie de l'attention.
Il s'agit de 17769 lecteurs(trices) ayant la possiblité d'être auteur(e)s.
Les transformer en cibles de l'économie de l'attention sans leur demander leur avis volontaire serait une manipulation de l'objectif premier de la liste (auto-formation horizontale d'une profession par le biais des échanges...)
Ce qui est ouvert/offert maintenant, c'est la possibilité pour chacun(e)
de ces lecteurs(trices) de proposer une autre forme de valorisation (économique ou symbolique) aux autres lecteurs(trices)/auteur(e)s.
Nous diffuserons les propositions auprès des 17 769 abonné(e)s...
La seule chose que nous protégeons, c'est l'usage du nom biblio-fr et l'usage de la liste d'adresses en dehors de la raison même de sa constitution (envoi collectif de messages au travers d'une modération).
Mais tu peux dire effectivement que nous nous protégeons, et au travers de nous les abonnés, de l'industrie de l'attention. Car il y a peut être d'autres valeurs qui lui sont supérieures, quelque soit l'intérêt et l'attraction du monde-média.
Salut Hervé,
Merci pour ta réaction, mais je crois qu'il y a un malentendu qui est sans doute une question de fond.
L'économie n'est pas simplement commerciale et ne fait pas simplement référence au profit. Il existe une économie publique, une économie sociale, une économie non-commerciale, qui prend d'ailleurs des formes très diverses selon les traditions culturelles des pays.
Ainsi l'économie de l'attention n'est pas simplement une économie commerciale. Biblio-fr a beaucoup fonctionné sur cette économie là. Si les professionnels y déposaient leur message c'est parce qu'ils pensaient ainsi attirer l'attention d'un grand nombre de leurs collègues, attention captée préalablement par la notoriété de la liste, à laquelle leur message contribuait selon le principe des effets de réseau (ou d'externalité).
Ma question n'était pas de valoriser commercialement l'attention captée, je dis d'ailleurs explicitement que c'est perpendiculaire au projet, mais de ne pas détruire le capital d'attention construit par votre travail patient de nombreuses années.
@Hervé @Jean-Michel
Fondamentalement d'accord avec vous deux, une fois la précision de Jean-Michel explicitée : "ne pas valoriser commercialement l'attention captée".
De ce point de vue, il est dommage d'abandonner l'aspect liste de diffusion ou liste de discussion pour passer à des outils plus contemporains, qui entraînent généralement dans leurs conditions d'usage une acceptation implicite ou explicite de la valorisation commerciale.
C'est la raison pour laquelle j'ai fermé mes comptes "officiels" sur Facebook, Twitter, Friendfeed, en particulier, et ne me sens pas à l'aise avec ce que véhiculent les outils ou pratiques "2.0".
Le billet de Dominique Lahary à propos de l'arrêt de biblio.fr, "Nous tous tué biblio-fr",
http://lahary.wordpress.com/2009/06...
me paraît fournir une base de réflexion intéressante sur les implications socio-économiques de l'abandon des forums et listes pour le système des blogs :
DL : « Nous nous sommes repliés sur les blogs. D’autres qui n’avaient jamais posté de point de vue sur biblio-fr sont directement passé au blog. Une autre forme de vie, de débat, de circulation de l’information est apparue. »
[...]
« Biblio-fr était notre maison commune et nous voilà éparpillés entre nos blogs personnels. »
[...]
« Bien des choses ont changé depuis 1993. Comme média collectif, sans doute, comme base de connaissances assurément, la messagerie est devenue une solution archaïque, difficile à gérer pour les modérateurs comme les récepteurs, alors que nous sommes à l’âge où les réseaux sociaux (biblio-fr en était un) disposent des outils du Web 2.0. Autant qu’ils servent, les wikis, fis RSS, nuages de tags, services questions réponse et sites de partage divers.
L’éclatement de ce que charriait biblio-fr est nécessaire parce que les fonctions étaient devenues trop divergentes ([Cela ]n’empêche pas d’en réunir l’accès, ou les adresses, quelque part)
Cela ne signifie pas que nous devons perdre tout support commun de débats. Je ne me résous pas au seul repliement sur les blogs personnels, si intéressants soient beaucoup d’entre eux. Ils ne sont d’ailleurs pas seulement des supports de débats. Le blog de du Bulletin des bibliothèques de France (http://bbf.enssib.fr/blog) joue un rôle de signalement : « sur tel blog, tel débat ». C’est déjà quelque chose. »
Voir aussi le commentaire de Nicomo et la réponse de D. Lahary :
«nicomo a dit
6 juin 2009 à 21:39
“Je ne suis pas ravi de ce passage du pot commun aux petites tambouilles privées (…) Je rêve d’un retour au collectif”.
C’est vraiment une question de génération, et de culture professionnelle. Il y a la génération 1968 (pour faire vraiment très très vite, et caricatural), et la culture professionnelle nourrie du collectif, et de l’ABF en particulier. Et puis il y a la génération 2000, et la culture des blogs.
Un exemple symbolique, mais symptomatique : je me souviens de l’auteur du blog Couv. ill. en coul., que je ne dénoncerais pas ici, qui appartient à la première génération / culture, dire dans un repas de blogueurs qu’il a envie d’arrêter et proposer de repasser le bébé à qui voudra, au collectif. Silence gêné de la génération 2000 présente en masse autour de la table : le blog, c’est perso, c’est pas du collectif, il est évident qu’aucun collectif, même celui des bloggueurs, regroupé-là lors d’un congrès ABF, ne reprendra quoi que ce soit.
Le “collectif” est remplacé par un réseau informel, toujours mouvant, ad hoc, de personnalités. Ce n’est pas du collectif ni du pot commun. Ce n’est pas non plus un strict individualisme. Ce n’est pas une parole publique, mais ce n’est pas une tambouille privée. C’est le net. »
Toujours difficile d'articuler contraintes techniques et pratiques : l'abandon du collectif est-il lié, encouragé ou impliqué par les techniques mises en place par le web 2.0 ou le reflet de pratiques socio-culturelles ?
@ Alain
Je ne suis pas vraiment convaincu par le discours sur l'inévitable éclatement et encore moins sur sa consonance générationnelle. C'est le même que celui qui annonce depuis 22 ans (date de ma thèse sur ce média ;-( ) que la télévision éclate en visionnages à la carte individuels. Jamais les jeunes générations n'ont autant regardé la télévision qu'aujourd'hui :
http://www.researchexcellence.com/V...