La difficulté quand une guerre est déclarée, c'est qu'il faut choisir son camp et que les nuances et la complexité ne trouvent plus de lieux pour s'exposer ou se discuter.

Les promoteurs et les adversaires du libre accès ont rarement évité la polémique simplificatrice. Pourtant du point de vue qui nous occupe ici, l'économie, tout n'est pas blanc ou noir, ni pour l'équilibre financier des revues en libre accès, ni pour l'attitude des chercheurs, ni pour le positionnement et le financement de dépots institutionnels dans les bibliothèques universitaires.

À Bruxelles même, certaines voies ont pointé les difficultés de la position d'éditeurs favorables au libre accès. Voici la traduction d'un extrait de compte rendu d'une table-ronde :

Bien qu'ils soient largement en faveur du libre accès, les éditeurs de la table ronde ont souligné que tirer une revue coute de l'argent et que, finalement, quelqu'un devait payer. "Nous sommes des éditeurs qui ne recherchons pas le profit, mais nous ne sommes pas pour autant pour les pertes !" Martin Blume, éditeur en chef du American Physical Society (APS). Aujourd'hui deux revues d'APS sur neuf sont en libre accès ; une est payée par le mécénat de gros laboratoires comme le CERN (European Organisation for Nuclear Research), tandis que l'autre s'appuie sur le système des "auteurs payant". Cependant les chercheurs qui publient dans les sept autres revues sont autorisés à déposer leurs articles dans les systèmes d'autoarchivage de leur institution.

Le British Medical Journal (BMJ) a été pendant quelques années complètement en libre accès, mais l'expérience a été arrêtée parce que la politique conduisait à une chute brutale des abonnements à la version papier. " Nous aimons l'idée du libre accès, mais nous nous sommes rendus compte que pour survivre nous devions fermer l'accès de notre site Web" a expliqué Alex Williamson, le directeur d'édition de BMJ.

Ils ont depuis une option où les auteurs peuvent payer pour rendre librement accessible leurs articles en ligne, mais moins de 2% d'auteurs la choisissent. M Williamson a souligné qu'environ la moitié des papiers reçus concernent des recherches non subventionnées ; ceci comprend des études de cas de praticiens généralistes ou des recherches sur des nouvelles techniques chirurgicales de groupes de chirurgiens. Obliger les auteurs à payer pour la publication découragerait la soumission de ces papiers pourtant intéressants, a noté M Williamson.

"Nous devons faire des expériences pour voir ce qui marche ou non", a conclu M.Williamson. "Nous avons essayé le libre accès ; cela n'a pas marché, alors nous sommes revenus en arrière".

Repéré par P Suber

Actu repérée par G. Chartron sur la liste RTP-DOC :

Cette fois de ce côté-ci de l'Atlantique et en réaction à une proposition faite au Congrès US de voter une loi obligeant la mise en ligne gratuite des articles scientifiques des recherches subventionnées sur fonds publics. Une fédération de 75 éditeurs non commerciaux proteste, non pas sur le principe du libre accès qu'elle soutient par ailleurs, mais sur celui d'une réglementation contraignante.

Extraits du communiqué :

“The scholarly publishing system is a delicate balance between the need to sustain journals financially and the goal of disseminating scientific knowledge as widely as possible. Publishers have voluntarily made more journal articles available free worldwide than at any time in history -- without government intervention,” noted Kathleen Case of the American Association for Cancer Research.

The Coalition expressed concern that a mandatory timetable for free access to all federally funded research could harm journals, scientists, and ultimately the public. Subscriptions to journals with a high percentage of federally funded research would decline rapidly. Subscription revenues support the quality control system known as peer review and also support the educational work of scientific societies that publish journals.

Undermining subscriptions would shift the cost of publication from the publisher who receives subscription revenue to the researcher who receives grants. Such a shift could:

  • Divert scarce dollars from research. Publishers now pay the cost of publication out of subscription revenue; if the authors have to pay, the funds will come from their research grants. Nonprofit journals without subscription revenue would have to rely on the authors’ grant funds to cover publication costs, which would divert funding from research.
  • Result in only well-funded scientists being able to publish their work. The ability to publish in scientific journals should be available equally to all.
  • Reduce the ability of journals to fund peer review. Most journals spend 40% or more of their revenue on quality control through the peer review system; without subscription income and with limitations on author fees, peer review would suffer
  • Harm those scientific societies that rely on income from journals to fund the professional development of scientists. Revenues from scholarly publications fund research, fellowships to junior scientists, continuing education, and mentoring programs to increase the number of women and under-represented groups in science, among many other activities.