Regarder la télévision sur son téléphone
Par Jean-Michel Salaun le dimanche 25 mars 2007, 05:23 - Télé - radio - Lien permanent
L'Atelier propose une série de reportages sur l'Asie.
Un de ceux-là concerne la télévision reçue sur le téléphone cellulaire. Celle-ci s'est imposée très rapidement en Corée du Sud. Extraits du billet :
Le succès a été immédiat : un million d’abonnés en seulement vingt mois pour accéder à ce nouveau service qui, et cela doit être souligné, est payant ! (..)
L’investissement est en effet considérable : 500 millions d’euros ont été injectés par les actionnaires pour mettre en place le système de diffusion (satellite et relais terrestres) auxquels s’ajouteront bientôt 73 millions d’euros pour développer davantage encore le service.
Les revenus sont pour 99% générés par les abonnés. Il faut compter environ 20 dollars pour ouvrir un compte et 11 dollars/mois d’abonnement. Des programmes au Pay Per View sont également disponibles pour environ 2 dollars. TU Média perçoit directement environ 50% de ces recettes. Les fournisseurs de contenus et les télécoms touchent 25% chacun.
La publicité, la distribution de contenus et la fourniture de technologies ne génèrent que 1% des revenus pour le moment. TU Media souhaite faire monter ce type de services entre 5 et 10% de ses revenus dans les années à venir.
Selon ce modèle économique, TU Media estime son seuil de rentabilité à 4,5 millions d’abonnés. Aujourd’hui, plus d’1 million de Coréens a pris le pli.
On trouve aussi dans le billet une présentation impressionnante des récepteurs. À retenir qu'il s'agit bien ici de télévision au sens traditionnel, il n'y a pas d'interactivité.
Commentaires
Brouillard coréen à trancher au couteau suisse :
Il semble que ce modèle économique soit basé sur la complémentarité entre un support et un autre. Dans ce cas-ci, regarder la télé sur un téléphone est complémentaire à la regarder sur un téléviseur conventionnel. L’un ne remplace pas l’autre dans la mesure on l’on peut penser que les Coréens qui regardent la télé sur leur téléphone ne le font pas aux heures où ils la regarderaient sur un téléviseur conventionnel.
Si, d’une part, les producteurs de contenu engrangent 25% des revenus bruts de ce service, il est fort probable qu’ils fidélisent, du même coup, les consommateurs de leurs séries populaires et retirent des revenus supplémentaires grâce à leurs autres services de diffusion (en publicité par exemple).
Dans ces conditions, est-ce que la télévision converge vers le téléphone ou au contraire, est-ce que cette complémentarité des supports provoque une espèce de «divergence» : deux supports (télé et téléphone) pour un même média (la télédiffusion)?
Il est intéressant de noter que dans les pays occidentaux la question de la téléphonie sur mobile n'est pas débattue de la même façon.
En effet, si en France les industries des télécommunications se penchent beaucoup sur la question en y voyant l'avenir de la télévision, l'Amérique du Nord reste sceptique.
En interviewant Paul Cauchon, journaliste spécialiste des médias au Devoir, nous avions évoqué cette question. Pour lui, la téléphonie sur mobile relevait du gadgétisme lui rappelant ces postes de télévision portatifs apparus dans les années 1970, qui n'avaient en rien supplanter les postes de télévision conventionnels et entamer le modèle économique de la télédiffusion. Enfin, Paul Cauchon affirmait que les opérateurs de téléphonie mobile ne pouvaient que faire diffuser des extraits vidéos de format clip et que le public n'était pas prêt à regarder la télévision traditionnelle sur un support tel qu'un cellulaire.
Pourtant, l'exemple de l'engouement pour ce nouveau mode de diffusion en Corée du Sud semble contredire tout cela.