Ce billet a été rédigé par Valentine Frey, étudiante de l'École de bibliothéconomie et des sciences de l'information dans le cadre du cours sur l'économie du document.

Quelle n’a pas été ma surprise lorsque « surfant » sur le site Ratatium, je suis tombée sur quelques billets portant sur le projet de loi de la télévision du futur adoptée par l’Assemblée Nationale en France le 31 janvier 2007.

Cette loi propose les éléments suivants :

  • A compter de 2012, les signaux émis par la télévision seront entièrement numériques ;
  • Cette loi donne un cadre à la TVHD et la télévision sur mobile ;
  • Enfin, en guise de compensation et afin d’encourager les principales chaînes (Canal+, M6 et TF1), l’Etat offre des chaînes « bonus ».

Aucun débat national n’a été médiatisé (au total contraire du débat relatif à la musique disponible sur IP) et pourtant, les partis politiques de l’opposition (UDF, PS et PC) se soulèvent contre l’adoption de cette loi. François Bayrou en l’occurrence, dénonce les privilèges accordés à ces grandes chaînes.

Les spécialistes de la TV 2.0, quant à eux, dénoncent l’ancrage de la télévision linéaire. La notion même de télévision du futur semble erronée dans cette loi : il n’y est jamais question de téléchargements des contenus par le peer to peer par exemple, de VOD (vidéo à la demande) ou de toutes les formes de service développées par la télévision 2.0. La convergence entre la télévision et IP ne transparaît pas dans cette loi.

Pourquoi l’Etat n’arrive à concevoir la télévision du futur telle qu’elle sera en réalité ? La raison fondamentale réside dans le bouleversement du modèle économique de la télévision traditionnelle que la convergence numérique implique. En effet, il est clair que l’Etat veut protéger les principaux télédiffuseurs : la télévision sur Internet redistribue les rôles.

  • D’une part, traditionnellement, ceux qui règnent en maître dans la télévision sont les télédiffuseurs. La télévision est structurée autour de grandes chaînes publiques ou privées qui détiennent le droit privé de l’émission. Les chaînes achètent les émissions dont ils détiennent les droits. Avec Internet, la répartition des bénéfices de la télévision; très complexe, n’est plus hiérarchisée lors de la négociation des droits. Internet bouleverse ce modèle économique. La question des droits n’est toujours pas réglée actuellement et devrait bénéficier d’une véritable étude : quel pourrait être le nouveau partage de ces droits ? L’enjeu, d’une extrême importance, est complexe à régler.
  • D’autre part, la convergence numérique implique une convergence des entreprises des télécommunications et de la télévision. Les nouveaux intervenants sont des fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et des opérateurs de télécommunications avec lesquels l’industrie télévisuelle se trouve en concurrence directe. Le poids économique relatif du groupe média sur le plan économique est largement insuffisant comparé à celui des télécommunications : les médias se trouvent dans une situation de dépendance. La différence de moyens financiers est spectaculaire. De même que la différence de taille des parcs d’abonnés. Voir :

Chantepie Philippe et Alain Le Diberder. Le nouveau paysage numérique. In Révolution numérique et industries culturelles. Paris : La Découverte. Extrait.

Pourtant, les groupes médias et les télédiffuseurs gardent une place de choix dans la diffusion des contenus aujourd’hui. Tout simplement, le web media n’est pas prêt de remplacer la télévision.