Facebook : bulle et diligence
Par Jean-Michel Salaun le mercredi 10 octobre 2007, 04:04 - Web 2.0 - Lien permanent
Juste une petite remarque en passant sur Facebook qui agite énormément les commentateurs sur le web jusqu'à mes collègues biblioblogueurs qui en ont fait leur sujet favori.
Sans doute le phénomène est étonnant. Mais il est impossible aujourd'hui d'en tirer une analyse pertinente, sauf éventuellement en sociologie de l'innovation, du fait de son évolution rapide et du brouillard que produit le buzz. En réalité, pour ses promoteurs dans l'immédiat il s'agit surtout de faire monter les enchères pour un éventuel rachat.
Par ailleurs, le terme « réseaux sociaux » est bien mal approprié, il s'agit d'abord de réseaux de machines. Et il est probable que là aussi « l'effet diligence » soit à l'œuvre où les caractéristiques de communications interpersonnelles sont plaquées sans précaution sur une logique technico-médiatique de nature sensiblement différente. Là encore, impossible de tirer des conclusions un tant soit peu fondées dans le maelström actuel.
Enfin, la plupart des biblioblogueurs concluent leurs analyses en indiquant qu'ils se sont inscrits pour voir, mais qu'ils n'y trouvent pas leur compte. Il y a là un sérieux paradoxe. S'ils souhaitent vraiment observer de l'intérieur, il faut qu'ils s'y immergent. S'ils hésitent à le faire, c'est bien qu'il y a en réalité des problèmes.
Alors, une suggestion camarades : il y a bien d'autres sujets. Attendons un peu plus de calme pour mieux mesurer le phénomène. À trop le suivre de près, on ne fait qu'amplifier les défauts signalés ci-dessus, et on se rend complice de manœuvres intéressées.
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Actu du 11 octobre 2007
À lire dans le même sens ce billet de Techcrunch sur un article du Wall Street Journal. Faut-il en rajouter ?
Commentaires
Salut Jean-Michel,
le terme de "complicité" est peut-ête un peu fort ... essayons d'y voir plutôt une forme "d'observation participante"
J'avoue que c'est le seul réseau social que j'utilise vraiment. Je pense que nous sommes plusieurs à faire de l'observation participante en effet. Je note que l'échange d'informations peut se faire par ce biais et le partage de news également grâce aux possiblités d'agréger de la communication klean-ex genre twitter mais aussi les derniers favoris ajoutés.
L'intérêt réside dans le fait qu'il y a des réseaux au sein du réseau facebook.
Sinon en terme de modèle économique, il est vrai par rapport à mon dernier commentaire, qu'il s'agit surtout de potentialités. Mais elles sont selon moi considérables.
Je vais faire un tour sur facebook au moins une fois par jour. Si un grand nombre d'usagers font de même cela peut être grandement intéressant pour les publicitaires. Le modèle économique publicitaire pourrait en cela se rapprocher de celui de la publicité à la télévision avec des stratégies de cible encore plus efficaces.
Bon promis, j'arrête sur facebook pour faire avancer Roger.
On m'a convaincu d'y faire le saut il y pas très longtemps. Je crois que Danah Boyd (www.zephoria.org ) est la personne qui offre les meilleurs éclaircissements sur le sujet.
Personnellement, c'est plutôt les questions sur l'ouverture du système, qui est propriétaire, et peut-être d'une future interopérabilité des différents services de réseaux sociaux qui m'intéressent. La possibilité de prendre son "graphe social" et de l'apporter dans un autre système ou tout simplement d'utiliser un service qui se branche aux autres services que nos "amis" auront choisis. Sur cette question, je crois que Dave Winer (un contributeur sur le RSS, la baladodiffusion et l'OPML) discute abondamment du sujet. (www.scripting.com )
Jean-Michel, j'ai l'impression que ceux qui parlent de Facebook pour dire qu'ils n'y trouvent pas leur compte, n'ont pas pour la plupart commencé à en jouer le jeu. Je suis assez d'accord avec toi lorsque tu dis qu'avant d'en parler, il faudrait commencer par s'y immerger. Mais je te renverrais volontiers le compliment (;-). J'essaie pour ma part de jouer ce jeu. Invité par Marlène, j'ai d'abord réagi de manière critique mais à l'usage, même si je vois les possibilités de time wasting immenses que recèle la chose, j'y trouve pour l'instant tout le contraire. Ou plus exactement, je gâche du temps sur Facebook lorsque je suis en veine de perdre du temps, ie sans FB je le perdrais ailleurs. C'est-à-dire qu'un peu de discipline (bien légère) n'est pas inutile. Je ne sais pas si le phénomène FB tiendra longtemps mais il me semble clair que son succès répond à des besoins et à un évolution de fond.
Merci pour vos témoignages.
Je ne conteste pas l'idée d'être présent sur FB pour observer, utiliser et analyser le phénomène de l'intérieur, mais le fait d'en rendre compte sur le Web pas à pas.
D'une part on ne dispose pas du recul suffisant pour une réflexion pertinente, d'autre part on participe au buzz recherché par ses promotteurs pour des raisons évidentes. Et je maintiens qu'il s'agit là d'une forme de complicité, même s'il n'y a pas de relation directe entre les acteurs.
Tout ce qui bouge fait de l'audience aussi pour les bibliobloggueurs. Mais sommes nous dans une course à l'audience ?
ReBonjour Jean-Michel,
J'avoue ne pas trop comprendre ta position. Le principe du blog - tel que je le conçois - est précisément de pouvoir rendre compte, en temps réel (et en acceptant l'imprécision ou parfois l'inexactitude qu'impose ledit temps réel) de phénomènes observés en tentant d'y apporter des éclairages soit scientifiques (pour les blogs "de chercheurs") soit professionalo-scientifico-bibliothéconomiques (pour les biblioblogs et assimilés).
La manière dont tu réponds aux divers commentaires me semble un peu tourner au procès d'intention. Je ne pense pas que Michel, Olivier (LDeuff) ou moi-même fonctionnions dans une logique de buzz ou d'audimat. Le fait de parvenir à poser, même approximativement et même probablement parfois de manière erronée, certaines problématiques ou certaines interrogations face à l'émergence d'une "phénomène" m'apparaît plutôt comme une richesse que comme un appauvrissement. Dans un an ou deux, on se posera la question (ou d'autres le feront pour nous et peut-être avant nous) de publier un "article scientifique" qui remettra les choses à leur place mais je continue à ne pas voir au nom de quoi nous devrions sombrer dans une auto-flagellation systématique nous interdisant de réfléchir "publiquement" à notre usage personnel du phénomène Facebook (ou d'un autre).
Bon j'arrête là pour ne pas virer au "troll" ;-) Mais en un mot comme en 100 je ne voie pas en quoi "le fait d'en rendre compte sur le web pas à pas" est contestable. D'autres le font, et ceux-là sont pour la plupart dans le travers que du décris. Et je préfère pouvoir disposer de l'avis de Michel, d'Olivier(LDeuff) ou du tien sur Facebook, plutôt que de me contenter de celui de Techcrunch ou de Loïc Le Meur.
Olivier, Mon billet et mes remarques ne concernent que ce moment précis et cette société précise pour laquelle des tractations sont en cours. Il est aussi utile de se rendre compte que nous avons une responsabilité dans ce domaine.
Il y a toute une marge entre un jour et deux ans ;-). Sommes-nous si pressés ?
Je crois que la recherche d'audience peut aussi être une tentation et un risque qu'il ne faut pas refuser de discuter sans la diaboliser.
Ce qui ne change rien à mes remarques précédentes sauf à maintenir un procès d'intention à l'égard du petit cercle de commentateurs sus-cités.
Fin du troll et de mes commentaires sur cette question, il faut que je retourne courir le buzz de manière irresponsable pour améliorer mon audience ... ;-)
finalement c'est sur Facebook que Roger devrait écrire un article. On a tous plein de choses à dire et je ne sais pas si on parviendrait à s'entendre mais il y aurait du débat.
Enfin, pour l'instant Facebook a réussi, en mal comme en bien, on en parle!
Voir un blogueur se plaindre du « brouillard que produit le buzz », c'est assurément un truc à encadrer, en rose bonbon.
Merci Jean-Michel !
Pierre