Un très grand nombre de médias et de blogueurs s'extasient devant l'investissement de 240 M USD de Microsoft dans Facebook pour 1,6% du capital en échange de l'exclusivité de la publicité jusqu'à 2011. Et chacun d'en conclure après une simple règle de trois que la compagnie pèse aujoud'hui 15 Mds. Rien n'est moins sûr.

La compagnie n'est pas cotée en bourse et le contrat n'est pas sans contrepartie. Si elle faisait son entrée en bourse demain, qui peut prétendre qu'elle serait valorisée au même niveau ? Par ailleurs, si elle cherche à vendre directement des actions à un autre partenaire, quelle contrepartie peut-elle offrir puisqu'elle vient d'aliéner la source principale de ses revenus ? Certes les marchés ont souvent manqué de rationnel et rien n'est à exclure de ce côté.

Mais, revenons sur terre et regardons de plus près la conjoncture. Sans doute, Facebook est une réussite étonnante et dispose déjà d'un chiffre d'affaires annuel estimé à 150 M USD, chiffre impressionnant compte tenu de sa jeunesse. Néanmoins sa croissance à venir pourrait être beaucoup moins solide qu'il est souvent affirmé.

Comme Google, Facebook repose sur le marché publicitaire. Plusieurs arguments sont alors avancés :

  • Bien des observateurs pensent que le système Flyers Pro serait plus efficace que le système Adsense de Google. Cela reste à prouver et le second dispose d'une bonne longueur commerciale d'avance. Mais admettons l'argument, le problème est que Adsense ne représente que 34% du revenu publicitaire de Google, contre 65% pour Adwords et il ne parait pas que la concurrence s'applique vraiment sur ce second service au modèle tout à fait original.
  • Par ailleurs, on met en avant la croissance forte du marché publicitaire en ligne, qui devrait soutenir la firme. En réalité, le marché publicitaire en ligne aux US est fragile du fait notamment de la crise immobilière, même si sa croissance serait encore de 25%. Les plus grosses croissances à venir sont ailleurs, notamment en Asie, mais Facebook n'y est pas présent.

Enfin, dernier élément à l'évidence erroné et pourtant répété à l'envi : Microsoft l'aurait emporté sur Google. Allons ! Google dispose de 13,1 Mds de cash en banque, il a montré en d'autres occasions qu'il savait mettre le prix quand l'enjeu lui semblait intéressant. Si la firme avait été sur les rangs, les enchères auraient grimpé beaucoup plus haut.

Donc, en résumé sans doute Facebook mérite l'attention, sans doute nous aurons d'autres surprises. Mais de grâce sachons garder mesure et ne participons pas à ce qui pourrait à terme devenir une dangereuse enflure !