La problématique des manuels numériques dans les premiers cycles universitaires est une question chaude. Après les revues scientifiques et parallèlement aux cours en ligne, en effet, la seconde publication académique à être touchée par la numérisation est le manuel de premier cycle qui se trouve pris entre deux logiques, parfois complices, parfois opposées : celle de l'éditeur et celle du professeur. Et les stratégies observées dans le premier domaine sont aussi à l'œuvre dans le second, tant du côté d'éditeurs commerciaux soucieux d'en retirer un profit maximum que d'universitaires militants pour l'accès libre.

Ces derniers ont aux États-Unis leur site Web (Make Textbooks affordable ici), avec vidéo sur YouTube etc. Ils viennent de publier une étude sur les coûts payés par les étudiants pour les manuels numériques :

Nicole Allen, Course Correction. How Digital Textbooks Are Off Track, And How to Set Them Straight (The Student PIRGs, Août 2008), rapport ici, présentation . Repéré grâce à H. Guillaud dans un commentaire ()

L'étude est sans doute de parti pris, puisque commanditée par un groupe de pression. Il n'empêche, ses résultats et son argumentaire sont bien intéressants. Extrait de la synthèse (trad JMS) :

Les manuels numériques doivent répondre à trois critères - abordables, accessibles et imprimable

Tout d'abord, les manuels numériques doivent être meilleur marché que les livres traditionnels. Pour être une solution aux coûts élevés, des manuels numériques doivent coûter moins chers que les livres traditionnels. Cela signifie que les manuels numériques doivent avoir un prix inférieur au coût net de l'achat d'un manuel - le prix d'achat moins le montant que les étudiants peuvent s'attendre à recevoir pour les vendre à la librairie.

Deuxièmement, les manuels numériques doivent être faciles et peu coûteux à imprimer. L'impression rend les manuels numériques pratiques pour les étudiants dont les styles de lecture et d'apprentissage sont différents. Bien qu'il n'existe pas un format valable pour tous, les étudiants semblent avoir une préférence générale pour les livres imprimés depuis les écrans d'ordinateur.

  • Le confort de lecture des étudiants sur un écran varie considérablement chez les étudiants interrogés. 33% se disaient confortables, 22% non et 45% entre les deux.
  • 75% des étudiants enquêtés ont dit préférer un livre imprimé et 60% qu'ils achèteraient une copie imprimée bon marché, même si le livre électronique était gratuit.

Troisièmement, les manuels numériques doivent être accessibles. Les étudiants doivent pouvoir y accéder en ligne, les stocker pour une utilisation hors ligne, et en garder une copie pour un usage futur. D'abord c'est justice. Une fois un manuel acheté, il doit être à eux, ils doivent pouvoir le garder et y avoir accès où ils veulent et quand ils veulent. Ensuite, toute restriction d'accès rend impraticable les livres numériques pour un grand nombre d'étudiants qui ont déjà un accès limité aux ordinateurs et/ou à l'internet.

  • 45% des étudiants enquêtés ont dit avoir un accès limité à l'ordinateur qui devrait leur causer quelque difficulté pour utiliser un livre numérique.
  • 71% ont dit avoir gardé au moins un manuel de référence pour l'avenir.

La suite, un peu convenue, montre que les éditeurs aujourd'hui ne répondent pas à ces exigences, en particulier que les manuels numériques reviennent in fine plus cher à l'étudiant que les manuels papiers, compte tenu des éléments ci-dessus, et qu'ils sont difficiles d'accès. Les auteurs plaident alors pour un accès ouvert et un partage de ressources.