Il est toujours délicat de mesurer la valeur économique des services documentaires, même si les études se sont multipliées ces dernières années utilisant les avancées dans l'analyse économique. Deux rapports récents sur l'impact économique des centres de données fournissent un éclairage révélateur, en utilisant des méthodes comparables :

Houghton, John. Costs and Benefits of Data Provision. Melbourne, Australie: Centre for Strategic Economic Studies Victoria University, septembre 2011. Pdf

Beagrie, Charles et Houghton, John (The Centre for Strategic Economic Studies, CSES). Economic Impact Evaluation of the Economic and Social Data Service. Royaume-Uni: Economic and Social Research Council, mars 2012. Pdf.

Le premier rapport s'intéresse à la valeur économique des centres de données publiques en Australie, plus précisément à la mesure du gain économique de la mise en accès libre des données publiques (Public Sector Information, PSI). Le raisonnement de l'étude est résumé par cette équation :

Houghton-Melbourne-2011.jpg

Je n'ai pas vraiment eu encore le temps d'en dégager les grandes lignes. Le second rapport m'a paru plus précis, fouillé et opérationnel. Il s'intéresse à la valeur d'un centre de données britannique, The Economic and Social Data Service (ESDS). Voici quelques extraits traduits du résumé :

Notre analyse économique additionne une série d'approches, partant des mesures les plus immédiates et directes de valeur, qui représentent probablement les estimations les plus faibles de la valeur des données et des services d'ESDS, pour aller vers l'extérieur afin d'estimer les avantages économiques plus larges. Cela comprend :

  • La valeur de l'investissement et de l'usage - les dépenses en temps et argent pour produire et obtenir les données et services d'ESDS, ce qui représente la valeur minimale d'ESDS.
  • La valeur contingente - le montant que les utilisateurs accepteraient de payer pour accéder aux données et services d'ESDS (propension à payer) et/ou le montant qu'il faudrait leur donner pour qu'ils renoncent à ces services (propension à accepter), ce qui représente la valeur d'ESDS pour les utilisateurs.
  • Le surplus du consommateur (ou rente du consommateur) - le total de la propension à payer moins le coût pour obtenir le service, soit le bénéfice qui découle de l'utilisation d'ESDS.
  • La valeur économique nette - le bénéfice découlant pour l'utilisateur moins le coût pour fournir les données et services d'ESDS.
  • La performance ou les gains d'efficacité - estimation des gains en efficacité de la recherche et de l'enseignement réalisés par les utilisateurs d'ESDS, qui représentent l'impact d'ESDS sur la communauté d'utilisateurs.
  • L'augmentation du retour sur investissement pour la création de données et les infrastructures - estimation de l'augmentation potentielle des retours sur investissements provenant des usages additionnels facilités par ESDS, qui indique l'impact d'ESDS sur les bailleurs de fonds, les créateurs et donneurs de données et les communautés d'utilisateurs.

Les données pour l'analyses proviennent de recherches d'information, d'entretiens et de deux enquêtes en ligne. Le résultat est résumé par ce tableau (j'ai converti les £ en € au taux du 1er janvier 2012) :

Valeur et impact de l'infrastructure de données de recherche ESDS

Le rapport propose par ailleurs de repérer les avantages résultant d'ESDS à partir des entrées suivantes sans pour autant les chiffrer. Il utilise pour cela un outil baptisé KRDS Benefits Framework, pour Keeping Research Data Safe proposé par Ch. Beagrie et schématisé ainsi :

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ESDS-2-2012.jpg ESDS-3-2012.jpg ESDS-4-2012.jpg

Même si ces rapports montrent que la réflexion sur l'évaluation des collections avance maintenant rapidement, ces méthodes restent délicates dans leur application. Il est en effet toujours difficile de quantifier les résultats des services publics et les chiffres fournis, par exemple, pour la valeur contingente restent fragiles. Néanmoins les étapes qui séparent la valeur créée pour les usagers, celle, plus globale, qui concerne l'objectif de la collectivité desservie, et enfin l'impact sur la société dans son ensemble me paraissent aller dans le bon sens (voir ici).