Les néo-spontex
Par Jean-Michel Salaun le mardi 16 octobre 2012, 11:50 - Bibliothèques - Lien permanent
Pour les plus jeunes lecteurs de ce blogue, le titre de ce billet est une référence amusée à quelques jeunes gens qui en France il y a plusieurs dizaines années déjà voulaient rétablir la justice populaire grâce à l'agit-prop au nom de la Cause du peuple.
Je ne vais pas me faire que des amis avec ce billet, d'autant que j'apprécie souvent les analyses de ceux que je vais critiquer... quand elles sont sérieuses, sincères et posées. Mais là, certains auront peut-être compris que je parle de la critique du service Refdoc de l'Inist, ils sont tombés dans les pièges de la posture et de l'enflure, l'Inist-Gate !!! On attend la démission prochaine du président. Il est vrai que le web favorise les dérapages, la montée des egos, les formules à l'emporte-pièce, la contagion de l'émotion mais, personnellement, j'attends justement de ceux qui en connaissent les rouages, qu'ils se flattent de démonter, une méthode et une argumentation qui se garde de ces facilités populistes.
Il y a en effet pas mal d'hypocrisie à jouer sur le seul argument d'une vente "illicite" d'articles scientifiques en flattant l'ego d'auteurs qui seraient lésés par des tarifs de vente exorbitants proposés sur leur dos. Que je sache aucun des auteurs concernés n'attend de retour financier sur la diffusion de sa production. en tous cas certainement pas ceux à qui s'adresse l'appel des nouveaux justiciers de l'IST. Et si l'INIST a été condamné effectivement pour n'avoir pas demandé l'autorisation d'un auteur, c'est au nom d'une justice que dénoncent ceux-là même qui crient le plus fort aujourd'hui : une défense d'un droit d'auteur sur la littérature scientifique, pire la volonté d'en tirer un profit financier ! Curieux paradoxe. Et ironie, on voudrait attaquer l'Inist pour parasitisme des services d'archives ouvertes, on attend l'action en justice ! Revenez sur terre camarades !
Enfin, si les articles sont disponibles par ailleurs, c'est d'abord l'affaire du demandeur de préférer l'une ou l'autre voie, sachant qu'il n'est pas très difficile de retrouver les documents aujourd'hui et qu'il n'est pas sûr que celui proposé par RefDoc soit le même que celui déposé sur une archive ouverte. Pour ma part tous mes articles sont disponibles, soit sur HAL, soit sur Papyrus, le service d'archives de l'Université de Montréal, mais, sauf erreur, aucun ne correspond exactement à la version publiée, ni dans sa lettre (des corrections ont été apportées dans la révision), ni dans sa forme.
Faut-il pour autant excuser l'Inist de la politique qu'il mène depuis trop longtemps, prisonnier de l'héritage d'une conception révolue de l'IST ? Evidemment non. Nous sommes nombreux à le déplorer depuis longtemps et le Cnrs est, bien entendu, coupable de n'avoir pas eu le courage de forcer les réformes, malgré les audits et avertissements. Pour autant la réalisation d'une base bibliographique francophone exhaustive, couplée à un accès payant ou non aux documents, est importante et complexe et ne se résoudra pas, j'en ai peur par des anathèmes simplificateurs.
Commentaires
Jean-Michel,
Je me permets de disconvenir. Nous vivons une drôle d'époque, où pourraient cohabiter des exploitations commerçantes de biens jugés par ailleurs publics (cf. les errements sur les frontières du domaine public) et des revendications (parfois plus idéologiques qu'allant jusqu'au bout de la démarche) de liberté et d'ouverture absolue.
Effectivement, la dévolution volontaire (ou lointainement post-mortem) de ses cogitations permet toute exploitation privée comme publique, gracieuse ou payante - sans exclusive -. Dans chacun des deux cas, c'est le choix contractuel et la loi qui dictent le statut de l’œuvre. Je ne suis pas juriste, mais il me semble que prime aujourd'hui le statut fondateur de l'auteur, en l'occurrence la primauté de la loi fondatrice : l'auteur est aujourd'hui éminemment maitre des contenus de son oeuvre, et les questions contractuelles ne viennent que secondairement, pour qu'il décide ou non de concéder ses droits patrimoniaux à un ou des intermédiaires, ou choisit de livrer sans retenue la production à l'appétit de chacun sans possibilité accessoire de commercialisation.
Il me parait incorrect d'incriminer les protestations de personnes prises au piège d'une commercialisation ni voulue ni respectueuse des réglementations actuelles et des statuts de droits d'exploitation décidés par ces auteurs, de les incriminer donc au prétexte qu'ils critiqueraient les exclusives éditoriales actuelles !
Les versions mises en ligne par l'INIST seraient légèrement différentes des versions finalement éditées ? Si c'est le cas - je n'ai pas ouvert mon porte-monnaie pour vérifier -, où et comment l'INIST s'est-il procuré les préprints de mes articles ? Je ne les ai communiqués qu'à l'éditeur, qui ne m'a jamais contacté pour un versement sur d'autres bases ni pour des exploitations accessoires.
Ce serait un problème d'ego, aggravé d'une volonté de rentabiliser son travail ? Je ne peux évidemment parler que pour moi-même :
- je n'ai pas la prétention d'être un chercheur de la qualité de ceux que l'Université génère et abrite, pas plus que je n'ai jamais espéré tirer quelque fortune de mes écrits (les éditeurs de mes livres me versent fidèlement un montant modeste aligné sur les ventes (ça me paye mon Noël !!) : quant aux revues, c'est gratis pro deo dans 95 % des cas)
- je sais pertinemment que mes maigres écrits sont reproduits ici ou là (pour un cours, un concours, etc.), sans autre rémunération que les migraines de mes lecteurs. La loi a par ailleurs instauré un CFC qui, parait-il, procède à des décomptes photocopiesques et me reverse de temps en temps trois francs six sous. Sincèrement, je m'en passerais volontiers !
- mais voir un organisme para-public (car au fond c'est le CNRS sous couvert d'une filiale) organiser une revente d'articles sur lesquels il ne dispose d'aucun droit, me révolte. Cela me révolte à un double titre : au titre de la loi en cours (je la respecte même si je souhaite qu'elle dispose un meilleur aménagement en faveur d'une protection/extension du domaine public), et au titre de la tromperie entretenue en direction d'une communauté d'étudiants et de chercheurs qui pensent en toute bonne fois que oui, il faut payer (autrement que par ses impôts) pour obtenir un écrit scientifique - et je ne parle pas de mes écrits, bien sûr ! -.
Car, cher Jean-Michel, ton dernier argument selon lequel c'est au demandeur de savoir où chercher et quelle voie choisir, cet argument ne tient pas. Cela suppose évidemment (vieille antienne de bibliothécaire) que le demandeur sache où chercher. Cela suppose aussi que ne se présente pas à lui LA référence ultime, celle qui promet au nom de la Recherche française, de procurer le suc de la production scientifique aux chercheurs. Car c'est bien cette tromperie sur la marchandise qui me révolte le plus, ce mutisme sur la construction du coût de fourniture, sous ce masque de service public.
Et puis oui, et là je suis mille fois d'accord, il y a un retard à l'allumage dans la politique de l'INIST. Tous ces anathèmes auraient pu être évités par une politique active de signalement des liens d'accès libre aux articles en question. Mais cela suppose évidemment une révision d'ensemble du modèle économique, et je le sais des investissements notables....
Amicalement, si si !!
Salut Jean-Michel.
Juste te féliciter pour ton titre :-) Et te dire que je reste ton ami :-) Et que là il est tard mais dès que possible je réponds à tes arguments.
Pour faire simple, toi et d'autres (Jean Véronis, Stevan Harnad, Hélène Bosc) avez effectivement plaidés à des niveaux différents pour un "laisser-faire", "le château s'effondrera de lui-même." Je pense que c'est cette attitude qui relève de la "posture".
Quand à l'argument (également partagé par les précédents cités) qui consiste à rejeter la faute sur le demandeur, il oublie que ledit demandeur est le plus souvent un collègue, un labo, une bibliothèque. Posture là encore de quelques-uns - dans lesquels je m'inclue volontiers - qui évoluent dans un genre de "petit monde" où tout le monde serait censé savoir qu'il exsite des archives ouvertes, où elles sont disponibles, quels types de documents y sont accessibles, etc. Désolé d'être brutal mais cette vision là est à des années lumière de la réalité-terrain, au moins en France. Les collègues sont majoritairement ignorants de ces questions (pour diverses raisons sur lesquelles on pourrait gloser des heures).
Enfin pardon mais en ce qui me concerne (mes petits camarades sont assez grands pour répondre), la posture et l'enflure sont assumés non comme des fins mais comme des moyens. Oui je suis convaincu que l'effet réseau actuel peut faire évoluer les choses beaucoup plus vite que les recours administratifs ou judiciaires habituels. Nous verrons d'ici peu si j'ai raison ou tort :-)
Et puis une dernière chose, ton argumentaire sur "Et si l'INIST a été condamné effectivement pour n'avoir pas demandé l'autorisation d'un auteur, c'est au nom d'une justice que dénoncent ceux-là même qui crient le plus fort aujourd'hui : une défense d'un droit d'auteur sur la littérature scientifique, pire la volonté d'en tirer un profit financier" est un pur sophisme. De cela il n'a jamais été question dans la démarche entreprise sur mon blog, ni dans celle relayée sur SavoirsCom1 ou dans les analyses de Lionel.
On en reparle à tête reposée et par blogs interposés.
Amitiés rouge pâle.
@ Olivier et Bertrand,
Merci pour votre fidélité amicale, je suis rassuré ;-)
En vrac, rapidement :
C'est bien en prenant notamment argument de la condamnation de l'Inist pour non respect du droit d'auteur à verser une somme conséquente (de mémoire 7000 Euros) que l'argumentaire est présenté dans les blogues. Donc pas de sophisme. Cet argument est pour le moins étonnant sous les doigts de gens prônant le libre accès.
La réaction de S Harnad sur twr est significative est plus cohérente. Même si elle ne tient pas dans la lettre du droit français, elle est conforme à l'esprit de l'OA :
« Stevan Harnad @AmSciForum
@affordanceinfo Ce qui est déjà enligne libre d'accès, peu importe si des troglodytes continuent à vendre - (CC-BY inclut droit à re-vendre) »
Le sophisme, ou disons l'erreur d'interprétation, est plutôt de laisser penser que je crois que les auteurs sont mus par un appât du gain dans une action en justice.
Qd je lis que nos collègues ne savent pas retrouver les articles, je me demande si nous vivons sur la même planète. Eh les gars, vous connaissez un truc qui s'appelle Google ? Il suffit d'avoir un morceau du titre (au hasard repéré sur Refdoc) pour voir apparaître dans les premières réponses l'article sur une archive. Démonstration avec le dernier article que j'ai déposé sur Papyrus : https://www.google.fr/search?q=la+f...
L'utilisation du web telle que tu l'as faite, Olivier, sur ton blog et sur twr notamment, cela s'appelle de l'agit-prop et j'avoue que cela m'a rappelé de mauvais souvenir et n'est pas pour rien dans ma réaction. Il y a d'autres façons, faisant appel à la raison et non à l'émotion, ne cherchant pas à saturer le buzz, d'utiliser les outils du web. Il faudrait aussi tirer les leçons politiques des conséquences à moyen terme des divers feux de paille qui embrasent les réseaux. A mon avis, il y aurait là un débat éthique.
Je maintiens que lorsqu'on demande aux auteurs d'aller vérifier le prix auquel est vendu leur article, parmi bien d'autres arguments du même tonneau les traitant de pigeons et autres noms d'oiseaux, on joue sur leur ego. Il suffit de suivre cela sur twr pour le confirmer.
Maintenant sur l'Inist, nous sommes d'accord sur le fond à une nuance près : l'enjeu d'une base biblio francophone exhaustive n'est pas négligeable, à condition qu'elle soit ouverte. Les négociations pour la construire, son financement et son montage ne sont pas simples et le plus grand reproche que l'on peut faire à l'Inist est de jouer depuis trop longtemps à la forteresse assiégée. Alors on pourrait dire que la fin justifie les moyens. Pas pour moi.
C'est bien de manier le sarcasme, mais encore faut-il que les arguments de fond soient à la hauteur des saillies drolatiques.
Je trouve particulièrement déplacé l'allusion à la justice populaire. L'Inist a été condamné deux fois en justice, par des décisions formelles et la dernière n'a pas été portée en Cassation. Il y a une chose, assez importante dans une République, qui s'appelle l'autorité de la chose jugée. L'inist la bafoue et l'action qui a été lancée vise à dénoncer ce "passage en force".
Deux condamnation en justice et on parle de "justice populaire" ? Que vous faut-il de plus ? Une bulle ponticificale ? Un mandat de l'ONU ? On croît rêver !
Par ailleurs encore une fois (j'ai déjà eu l'occasion de le déplorer dans les commentaires de votre blog), vous caricaturez notre position. Nous n’aurions donc pas le droit d'exiger le respect de notre droit d'auteur, parce que par ailleurs nous en demandons la réforme ? C'est bien ça ?
Mais nous n'avons jamais demandé l'abolition du droit d'auteur. Au contraire, ce que nous voulons c'est un retour aux sources de cette notion, avec un droit davantage centré sur l'auteur lui-même et lui donnant réellement le choix, plutôt qu'un droit d'intermédiaires.
Or ici, au-delà de l'Inist, ce sont les agissements du CFC qui sont directement en cause, car c'est par son biais que l'Inist a pu se donner l’apparence d'une base légale. Et c'est cette société de gestion collective qui a tâché d'obtenir une cession plus large que celle que lui donnait la loi.
Doit-on l'accepter ? Au nom de quoi ? Et oui, je le dis, s'il fallait en arriver là, un nouveau procès serait tout à fait justifier à mes yeux, pour réaffirmer que le droit d'auteur passe d'abord par l'auteur (c'est aussi le principe de base des Creative Commons, vous savez... et des Archives ouvertes !).
Concernant le parasitisme, là encore, vous caricaturez, peut-être ici sans savoir. Le parasitisme est un moyen d'action très intéressant et négligé, notamment parce qu'il a été éclipsé par le droit des bases de données (notoirement inapplicable et contre-productif). L'intérêt du parasitisme, c'est de ne pas s'appuyer sur la propriété intellectuelle, mais de quand même donner un moyen d'action pour contrer des agissements contestables.
L'accusation de maoïsme que vous lancez contre nous me fait à vrai beaucoup rire, car figurez-vous qu'un député a décidé de relayer ce mouvement en déposant une question écrite au gouvernement et il s'agit de... l'UMP Lionel Tardy ! On a fait mieux comme gauchiste révolutionnaire, vous ne trouvez pas ?
Et là aussi, le fait qu'un député se saisisse de la question, cela vous paraît relever de la justice populaire ? Ou du contrôle démocratique tout simplement, car la tutelle du Ministère ne pouvait pas ignorer que l'Inist continuait RefDoc malgré les condamnations.
Dernier point qui relève cette fois chez vous de la contradiction : vous reportez sur l'utilisateur la charge de trouver par lui-même les articles dans les archives ouvertes. mais vous êtes le premier à revenir sur les questions d'économie de l'attention sur d'autres sujets (quand ça vous arrange...). Or ici, nous sommes en plein dans une question d'économie de l'attention, car un service comme refDoc a une visibilité, de par sa fonction d'agrégation, que peuvent ne pas avoir les archives ouvertes, notamment vis-à-vis de l'étranger.
L'action que nous avons lancée vise aussi à défendre un bien commun de la connaissance - l'Open Access - contre un risque d'enclosure. Et c'est là d'ailleurs que l'on voit que la défense d'un droit d'auteur régénéré par un retour aux sources rejoint celle des biens communs du savoir.
Attention aux caricatures ! Et gare à l'accusation d'hypocrisie, qui a souvent tendance à revenir comme un boomerang.
Calimao ;-)
PS : cela dit, on se retrouve quand même (encore) sur quelques poins et merci de votre billet récent sur le domaine public. C'était particulièrement à propos.
Et juste comme ça quand même...
Remarquez que vous vous gaussez que n. Seydoux parle de communisme à propos de ceux qui défendent le domaine public.
Mais vous tombez exactement dans le même travers en assimilant ceux qui défendent les biens communs à des maoïstes.
On devrait bannir ce genre de procédés rhétoriques et débattre sur le fond.
Est-ce que je vous traite de Versaillais ou de Thermidorien, moi ? ;-)
Calistaline
Bonjour Jean-Michel,
je ne suis l'affaire que de loin, mais une phrase me fait réagir, et vivement, dans ton argumentaire : d'où viendrait l'idée que le libre accès est contradictoire avec le droit d'auteur ? C'est pour moi une véritable erreur de le considérer. Je peux même aller plus loin : le "libre" (logiciel libre, licences creative commons) se situe pleinement dans le droit d'auteur, s'appuie sur lui et ne pourrait pas exister sans lui. Il n'y a aucune contradiction à soutenir le libre accès et à se prévaloir du droit d'auteur.
Amitiés,
Piotrr
et moi aussi Jean-Michel je tiens à rester de tes amis non mais
cependant, je ne comprends rien à la rhétorique ci-dessus, pour un fait très simple, et qui, en tant que père de 5 enfants ayant édité son 1er livre en 1982 et n'ayant d'autre ressource que le clavier : je réfute au CNRS le droit de commercialiser mon travail sans autorisation préalable, ni droits afférants en contrepartie
la mise à libre disposition de certains de ces textes sur mon site web, ou la double existence de versions html accès libre sur mon site (licence BY-NC-SA) et version éditée et commercialisée sur publie.net ne peut en rien légitimer ces pratiques
et mêler à cette réflexion de fond initiée par OE ou LM, et pas d'aujourd'hui, sur la dialectique du libre accès, du partage des savoirs, des logiques documentaires et moteurs de recherche, avec ces sous-entendus d'agitateurs bouffon ce n'est pas digne de toi
reste à savoir pourquoi, en tant que responsable institutionnel en France d'un labo de pointe sur ces questions, tu choisis ton blog montréalais pour t'exprimer ? est-ce que Normale Sup a partie liée avec ces épiciers nettement plus bouffons que ceux que tu dénonces ?
Je vais finir par remercier Olivier, rien de tel qu'un peu de polémique pour retrouver chez soi ses vrais amis ;-) !
@ François
D'accord avec toi sur la question du droit d'auteur patrimonial. Mais tu es dans un cas différent d'un auteur scientifique. Tu en vis.
Sur l'utilisation de ce blogue (monté à Montréal par H Le Crosnier, j'aggrave mon cas ;-)), c'est tout simplement par fidélité. Je suis encore professeur associé à l'université de Montréal (cela d'ailleurs va se voir bientôt par le redémarrage du cours transatlantique). En quoi est-ce génant ? Je te rassure, il n'y a aucune relation entre l'Inist et l'ENS de Lyon. Par ailleurs, le master archinfo de l'ENS Lyon a une ferme de blogue chez hypotheses.org : http://archinfo.hypotheses.org/
@François et Lionel
L'allusion aux Spontex est d'abord un clin d’œil, qui ne touchera sans doute que les gens de ma génération. Un peu d'humour, qu'on peut apprécier ou pas je le conçois.
La partie de la référence (un peu) plus sérieuse à ce tout petit moment d'histoire ne concerne pas la contestation d'une justice légitime contre une justice populaire, mais comme je l'ai dit à Olivier l'agit-prop. Et il est difficile de contester que dans cette affaire les leaders n'ont pas fait dans la nuance et ont utilisé un savoir de battage sur les réseaux que n'ont pas la plupart des internautes. Personnellement, j'ai moyennement apprécié cet humour-là.
@ tous
Je me suis sans doute mal fait comprendre sur le droit d'auteur. Il ne s'agit pas d'opposer droit d'auteur et Open Access, mais de faire remarquer que par définition dans l'OA, l'auteur renonce à ses droits patrimoniaux. C'est d'ailleurs tout le sens du Twt de S Harnad. Dans le procès qui a eu lieu, la question des droits patrimoniaux n'était pas, sauf erreur, au second plan. Il y a bien un paradoxe à utiliser cette affaire, même si, bien sûr, la position de l'Inist était condamnable, a été condamnée sans que cela ne modifie son attitude. Je respecte la chose jugée, mais trouve étonnant que cet argument conduise à s'appuyer sur un plaignant dont l'attitude est à l'opposée de la sienne. Mais j'imagine que cela est courant en droit.
@ Lionel
Désolé de caricaturer toujours ;-).
Sur l'économie de l'attention, il me semble que le premier réflexe de tout internaute est bien aujourd'hui de passer par Google. En l’occurrence, l'économie de l'attention favorise l'OA qui s'est donné les moyens d'être correctement moissonné et c'est très bien ainsi.
Sur le parasitisme, je conçois qu'il s'agisse d'une procédure juridique subtile et intéressante, mais je ne vois pas des systèmes d'archives ouvertes lancer une action en justice contre Refdoc. Ce serait un peu baroque, non ?
Sans doute, des auteurs peuvent se lancer dans un procès au nom du respect du droit d'auteur. Mais quel est l'intérêt pour eux ? Etre déférencés de Refdoc ?
Le problème est une question de gestion des deniers publics. C'est la politique et la gestion de l'Inist qui sont à remettre en cause. Pour avoir eu l'occasion d'en discuter (il y a très longtemps je vous rassure) avec quelques-uns des responsables, la situation et les enjeux m'ont paru beaucoup plus complexes que ce que j'ai pu lire. Encore une fois, cela n'exonère pas l'Inist de s'être assis sur un jugement, ni surtout de n'avoir pas su se réformer. Mais il y a comme un hiatus entre le problème réel et les arguments et les méthodes employées ces derniers jours.
Désolé, je reviens sur ce point, mais il est faux de soutenir que l'Open Access équivaut à un renoncement de ses droits patrimoniaux par l'auteur.
Allez voir dans HAL : à moins d'être placés sous une licence particulière par l'auteur, les articles restent soumis au droit d'auteur classique. La plateforme HAL elle-même n'est pas sous licence libre et elle ne propose pas aux auteurs le choix de cette diffusion alternative.
Il ne faut pas confondre Open Access (accès) et Open Reuse (réutilisation). Ce sont deux choses différentes.En gros, HAL n'est pas PLoS (placé sous CC).
Il y a effectivement des discussions en cours pour savoir si la plateforme doit évoluer pour proposer les licences Creative Commons aux auteurs ou leur en imposer une, m!ais les choses ne sont pas encore faites.
Après, sur ce point, je pense effectivement que les archives ouvertes devraient être placées sous licence libre, mais une réflexion attentive est à mener, pour éviter justement le risque de réenclosures, car le monde de la recherche est dans un rapport particulier avec le secteur privé (et public, même ! Comme nous ne montre l'affaire Inist/RefDoc).
Faut-il maintenir le NC ? le SA ? Laisser le choix aux auteurs de leur licence ? Leur en imposer une ? Ce sont des questions importantes.
Mais en l'état actuel, votre prémisse est fausse : la grande majorité des archives ouvertes ne sont pas sous licence libre.
Calitrotsky
merci du dialogue, Jean-Michel
sans aucune volonté de polémique, crois-le, mais juste pour mieux comprendre 1 ce qui se trame dans tout ça 2 comment vous les grands pontes analysez et avec quel vocabulaire vous décrivez votre univers du document... tu dis "tu es dans un cas différent d'un auteur scientifique"
1, comment définis-tu un "auteur scientifique" d'un qui ne l'est pas ? si je ne suis pas un auteur scientifique, en quoi mes articles repris par le CNRS (concernant 2 approches critiques de Gracq et de Benard Noël, pour ceux que j'ai repérés) diffèrent sur le fond d'une approche critique faite par un "scientifique" ? est-ce une question de diplôme préalable, mais alors le CNRS aurait dû vérifier mon absence de diplôme avant d'aller piocher au hasard dans mes publications ?
2, la nature scientifique, si elle vaut pour le texte, l'exclut-elle du droit commun concernant le droit d'auteur ?
3, la nature scientifique, si elle vaut comme tu le laisses entendre pour l'auteur, est-ce que tu usais de l'expression pour signifier seulement "fonctionnaire écrivant dans le cadre de sa fonction" ? (par exemple, Christine Genin demandant le retrait d'un texte sien concernant pbs spécifiques des bibliothèques, dont elle est conservateur, elle a tort ?)
4, et corollaire : dans la mesure où un texte est écrit par un chercheur ou un enseignant es qualités, le texte appartient donc à son commanditaire ou à son institution, laissant libre le CNRS d'en disposer ?, mais ça ne vaudrait selon toi que pour les articles et pas les livres ? ou les textes ayant à voir avec leur champ de compétence ? (par exemple je diffuse sur publie.net une fiction d'Olivier Le Deuff sur la part inconnue des moteurs de recherche quant à l'identité numérique, je spolie le CNRS au regard du caractère "auteur scientifique" d'OLD ?)
suis complètement d'accord avec toi qu'on aille sérieusement dans tout cela, donc merci d'avance de réponse à ces 4 points, parce que je ne comprends pas comment ta formulation permet de différencier ce qui me concerne de ce qui concerne les universitaires – là depuis 5 mois je rends visite chaque jeudi à un labo scientifique d'Orsay-Saclay (univ P-Sud, CEA, INRIA), jamais croisé un seul scientifique qui écrive durant ses heures salariées
En ce qui concerne le monde académique français, penser que le premier réflexe est de passer par Google relève, à mon sens, de l'acte de foi mal placé. Dans le domaine littéraire (Littérature, Linguistique, Histoire au moins), on en est très, très loin. Si loin que c'est l'idée qu'il puisse y avoir des ressources utiles aux doctorants qui semble saugrenue. Sudoc représente souvent dans ces domaines l'alpha et l'omega de la recherche documentaire.
Il y a donc encore toute une éducation à faire, et RefDoc y joue un jeu contre-productif, celui de donner à penser que l'accès aux ressources en ligne est nécessairement onéreux, et que les seuls résultats valables sont ceux derrière une barrière de paiement.
@Calitrotsky (petit point sur le pseudo : attention à ne pas confondre trotskards et maos. Il fut un temps où cela n'était pas sans risque ;-))
Sans doute vous avez raison en droit et je me garderai bien de vous contester cette compétence. Mais l'esprit même d'une archive ouverte est la mise à disposition libre et gratuite des documents, et donc de fait le renoncement aux droits patrimoniaux au moins dans le cadre de l'exploitation de l'archive. Que Refdoc ne soit pas fondé en droit à "commercialiser" ces textes, sans doute. Mais y a-t-il une logique, autre que strictement juridique ou émotive (quoi on vend MON article 40 Euros !), pour un auteur à s'y opposer ? Peut-être dans quelques cas ponctuels pour leur réutilisation dans une autre publication commerciale par ex, mais peut-on vraiment légitimer une action collective sur des cas particuliers ?
@François
Je ne suis pas un ponte... même s'il m'arrive de pondre qques textes de temps en temps ;-). Je vais essayer de répondre à tes points.
1. Un auteur scientifique normalement accepte de faire réviser ses textes par ses pairs. C'est la pratique normale pour les articles de revues. Pour les livres, c'est le directeur de collection, qui doit être un pair, qui joue ce rôle. Donc ce n'est pas la qualité de l'auteur qui compte, mais la qualité des évaluateurs qui sont choisis parmi les personnes référentes dans la discipline concernée.
Il existe dans les OA et dans Refdoc des textes qui n'ont pas suivi la totalité de ce processus, mais il ne s'agit pas du cœur du corpus.
2. Calimaq me corrigera si je me trompe. Mais le texte scientifique n'est évidemment pas exclu du droit d'auteur. Simplement, la pratique est sensiblement différente que celle de l'édition classique. Un ex parmi d'autres, le droit moral peut-être protégé de fait par le dépôt dans une AO, qui, de fait, fait office de référent à la minute près. Cela peut avoir de l'importance dans certaines disciplines de sc de la nature où la compétition est très forte.
3. Sur le fond, j'ai répondu en 1. En pratique, je pense que les auteurs qui demandent le retrait de leur référencement se tirent une balle dans le pied, sauf éventuellement s'ils visent une exploitation commerciale de leur texte ou évidemment s'ils cherchent des dommages et intérêts.
4. Non évidemment. Le Cnrs n'est propriétaire de rien. Et un auteur peut être à la fois scientifique qd il se plie aux règles précisées plus haut et littéraire à un autre moment.
J'ajoute, mais c'est un autre débat, qu'en règle générale mais pas toujours (et ce dernier point mériterait investigations), un auteur scientifique est d'abord payé pour chercher et si possible trouver. Sa fonction auctoriale vient en second. Pour cette dernière activité, il a dans les faits souvent plus intérêt à être publié (pour allonger sa bibliographie qui est une carte de visite professionnelle) qu'à être lu. Cela explique aussi la méconnaissance générale qu'ont ces auteurs des circuits de diffusion.
@ Mathieu
Encore une fois, nous ne vivons sans doute pas dans le même monde, et pourtant je ne suis pas dans une institution réputée à la pointe du numérique...
Toutes les études faites sur les étudiants et les doctorants montrent que Google est le premier réflexe, le pb est plutôt inverse : comment apprendre aux étudiants à chercher ailleurs. De plus, le réflexe de gratuité général sur le web induit une attitude de résistance face aux services payants.
merci, Jean-Michel (le terme était mal choisi, mais tu as quand même position d'autorité et référence, au moins pour nous qui te lisons depuis tant, et avons tant appris ici)
cette question de "validation" recoupe discussion amorcée le mois dernier quant à notre collection publie.net en partenariat avec centres de recherches et universités (1er opus paraîtra février) et effectivement ce n'est pas mineur
ma présence ne vaut dans cette discussion que parce qu'on doit être un sacré paquet d'auteurs littéraires à se retrouver présent dans cette base commerciale sans avoir été sollicités (pour ma part, apparemment des textes repêchés au petit bonheur dans revues comme Europe ou NRF), et aux antipodes de ce principe de validation
rebond à ton dialogue avec Lionel : je suis très réticent sur ces expressions "réflexes de gratuité", "résistance aux services payants", le doublement d'année en année de notre expérience d'éditeur numérique tendrait à prouver que ce n'est pas une généralité, et que cela tient aussi en bonne partie à la qualité d'élaboration des contenus proposés
"Toutes les études faites sur les étudiants"
Le problème, pour que j'ai pu en voir, est là : ces études sont souvent administrées par des moyens informatiques, te très rarement corrigées du biais de sélection fondamental (non-réponse des non-utilisateurs de ces moyens) et du biais de sélection disciplinaire.
Ian Rowlands et coll., “The Google generation: the information behaviour of the researcher of the future,” Aslib Proceedings 60, no. 4 (2008): 290 – 310.
http://www.emeraldinsight.com/journ...
Et pour une version abrégée en accès libre : http://www.jisc.ac.uk/media/documen...
Hello Jean-Michel (et tes nombreux amis-commentateurs ;-)
Je partage certaines de tes remarques. En particulier l'ambiguité sur l'usage des procès dans une bataille qui est avant tout "politique" (il s'agit de convaincre les chercheurs d'accentuer la construction des communs du savoir).
Mais comme d'habitude, je considère qu'il vaut mieux "faire mouvement" et que c'est dans l'action que les idées se forgent, que l'expérience se fait et que les théories peuvent s'approfondir et s'étendre. C'est mon vieux coté spontex, ou mon côté de vieux spontex.
J'ai émis dans le groupe certaines remarques pour éviter des dérives et des simplifications. Mais dès le premier jour j'ai envoyé ma demande de retrait de refDoc. C'est je crois une position de chercheur engagé. Elle a souvent mauvaise presse en France, quand les universitaires devraient toujours peser et soupeser, au point de ne se décider à agir qu'à la fumée des cierges. Tu sais bien que j'ai choisi le contraire... pour les raisons exprimées ci-dessus... et qui n'est pas sans rapport avec mes raisonnements théoriques ;-)
Il y a une chose que personne n'a souligné, et qui m'incite plus encore à poursuivre cette action : l'INIST était une société privée jusqu'à ce qu'en décembre dernier celle-ci soit dissoute et ré-intègre le CNRS. Mais à cette époque, et donc contradictoirement, il y avait une "base de données bibliographique" qui était disponible. Charge à celui qui y avait effectué une recherche de trouver l'article, soit pas ses propres moyens (Google, comme tu l'as souligné, soit au travers de sa bibliothèque... qui si elle n'avait pas le document s'en référait au prêt inter-bibliothèques, et souvent en dernière instance à l'INIST lui-même).
Dans le cas d'une banque de données bibliographique, la description que tu fais de l'attitude du chercheur pouvait encore fonctionner. Or articles@inist n'existe plus et a été remplacé par un "catalogue de produits en vente" (i.e. refDoc).
C'est je crois un changement majeur sur le rôle de l'INIST dans la recherche (passer d'une position d'appui et de centre de référence à une position de vendeur).
Or si nous voulons étendre les communs de la recherche scientifique (et je ne doute pas que tu le souhaite également, même si tu utilises d'autres termes), il faudra trouver des mode d'interaction entre la philosophie/pratique des acteurs des communs et la philosophie/pratique de l'économie publique.
Et c'est là que l'action engagée prend plus de sens : remettre les missions de service public en cohérence avec les producteurs de communs et non en faire des copieurs du modèle privé.
Après, dans toute action il y a des exagérations, de l'agit-prop, des mots de trop... mais ce n'est pas grave. Une action booste la réflexion, elle n'est pas en elle-même et par elle-même une théorie (là, c'est presque du Lukacs dans le texte, isn't it ?).
Amitiés
Hervé
PS : je suis très fier d'avoir installé ton blog à Montréal et de t'avoir poussé à l'utiliser... ce que tu en as fait mérite vraiment pour toute la communauté. J'en connais un qui n'a même pas de blog ;-(
Salut l'ami Hervé,
Tout d'abord merci de montrer que ma référence historique n'était pas si mauvaise ! La Cause est bonne, que les moyens soient discutables et l'analyse tronquée est secondaire... vieux débat d'anciens combattants.
Le fond de ton argumentaire me paraît plus important. Que n'a-t-il pas été exprimé plus tôt ! J'avoue ne pas avoir trop suivi les dernières évolutions de l'Inist et en être resté à article@inist et je ne comprends pas très bien les subtilités du changement. Mais s'il y a de la complexité, le premier devoir de l'intellectuel, de mon point de vue, est de ne pas jouer au simplisme.
Je suis bien d'accord pour que les pratiques du public dans l'information s'éclaircissent. Contrairement à ce qui est dit, cela va plutôt assez vite. Mais :
1. L'évolution est extrêmement rapide. On est passé en qques dizaines d'années de "l'information est le pétrole de la France" aux données ouvertes. Il est normal que cela prenne un peu de temps, que l'on ait des contradictions et il est logique qu'il y ait une certaine prudence. Qui peut prétendre dans une telle précipitation détenir la vérité absolue ? Le "libérez les données" de T Berners-Lee n'est pas sans ambiguïté.
2. Le financement des prestations publiques ne peut non plus être résolu par des yakas. De ce côté les propositions sont particulièrement faibles.
Enfin peut-être aussi qu'une part de mon agacement provient de cette utilisation du droit d'auteur à la française qui survalorise le créateur en le fusionnant avec son œuvre, et de voir combien facilement les collègues, y compris certains illustres, tombent dans ce panneau. En caricaturant (pardon Lionel !), on accuserait presque l'Inist d'être proxénète.
Il serait bien temps, à mon avis, que le débat se complète de réflexions politiques sur les thèmes de 'société/économie/industrie de la connaissance', avec des prises de position étrangères à l'approche à partir du droit d'auteur… Ars Industrialis, peut-être, pourrait contribuer à la réflexion ?
Sans négliger pour autant les actions de résistance, guerilla et agit-prop…