Economie du document (Bloc-notes de Jean-Michel Salaün)

Repérage de données sur l'économie des documents dans un environnement numérique

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vendredi 17 août 2007

Bourse et bulle

En cette période où les dettes contractées sur le marché immobilier US inquiètent la bourse, il est intéressant de voir comment réagissent les valeurs du Web. EBay a plongé, mais la cause est aussi conjoncturelle (panne de Skype). Le graphique ci-dessous compare les indices de Google (bleu) avec Microsoft (rouge) et le NASDAQ (vert), sur une période de trois mois, puis sur une année :

On y constate effectivement une chute nette de la valeur depuis mi-juillet environ, même si sur une année l'appréciation est encore très confortable, de plus de 30% pour Google. Donc le verre est à moitié plein ou à moitié vide, tout dépend du moment où l'on a acquis les actions.

Les prévisions en bourse sont toujours aléatoires, d'autant que ce n'est pas ma spécialité. Néanmoins un autre chiffre m'a étonné : la capitalisation boursière de Google est le 17 août 2007 de 153,42 Md USD soit (sauf erreur de calcul de ma part puisque son CA 2006 est d'environ 10,6 Mds) 14,5 années de chiffre d'affaires soit plus du double des sept années déjà inquiétantes dont j'avais parlé dans un billet au début de l'année !

On peut comprendre une certaine nervosité.. Et comme une bonne part des cadres de ces entreprises disposent d'une rémunération en Stock-options, un accident boursier aurait plus de conséquences que dans un autre secteur.

jeudi 16 août 2007

Les droits.. et devoirs des auteurs scientifiques canadiens

L'Association des Bibliothèques de Recherche du Canada (CARL-ARBC) vient de publier en association avec SPARC un addendum aux contrats de droits d'auteur pour les scientifiques canadiens qui désireraient mettre librement à disposition en ligne leurs articles, alors que ceux-ci pourraient être protégés par des droits exclusifs de l'éditeur. Voici un extrait de la fiche d'explication :

  • L’auteur est le titulaire des droits d’auteur. À titre d’auteur d’une oeuvre, vous êtes le titulaire des droits d’auteur, à moins que vous ne cédiez ces droits à un tiers par une entente signée.
  • Céder vos droits comporte des conséquences. De façon générale, le titulaire de droits d’auteur détient les droits exclusifs de reproduction, de diffusion, de représentation ou d’affichage public et de modification de l’oeuvre originale. L’auteur ayant cédé tous ses droits ne pourra accomplir aucune des choses mentionnées ci-dessus sans avoir au préalable obtenu une autorisation, à moins qu’il ne s’agisse d’exemptions prévues dans la Loi sur le droit d’auteur.
  • Le titulaire des droits d’auteur contrôle l’oeuvre. Les décisions relatives à l’usage de l’oeuvre, telles que la diffusion, l’accès, le prix demandé, les mises à jour et toute restriction d’utilisation, appartiennent au titulaire des droits d’auteur. Les auteurs qui ont cédé tous leurs droits peuvent ne pas être en mesure de diffuser leur oeuvre sur des sites Web destinés à des cours, de la copier pour la distribuer à des étudiants ou des collègues, de la déposer dans des archives ouvertes tels que le dépôt institutionnel de leur université ou d’en utiliser des parties dans le cadre d’une publication ultérieure. C’est pourquoi il est important que vous conserviez les droits dont vous avez besoin.
  • Vous n’avez pas à céder vos droits de façon exclusive. La loi vous permet de céder des droits d’auteur tout en conservant certains droits pour vous-même et des tiers. C’est ce que l’Addenda de l’auteur canadien SPARC vous permet de faire.

J'ajoute que, pour un chercheur, maîtriser la propriété intellectuelle de ses oeuvres est un droit.. mais qu'en faciliter la diffusion est un devoir.

mercredi 15 août 2007

Médias, temps et publicité

L'étude est ancienne, les résultats pas vraiment nouveaux, mais les schémas sont parlants. Il s'agit du marché US.

A Day in the Life: An Ethnographic Study of Media Consumption, Online Publishers Association, Juillet 2006. Pdf : Texte, diapos

mardi 14 août 2007

Roger et la trahison de Google Books

Inheritance and loss? A brief survey of Google Books by Paul Duguid First Monday, volume 12, number 8 (August 2007). Html

Un article sur la qualité de la numérisation de livres chez Google qui mérite attention, non pour ses constatations : la qualité est mauvaise, c'est bien connu et documenté, mais pour la conclusion. Extrait (trad JMS) :

Le Google Books Project est surement un programme important, sur plus d'un point même inestimable. C'est aussi, comme la preuve en a été brièvement administrée ici, un programme hautement problématique. Comptant sur la puissance de ses outils de recherche, Google a négligé des métadonnées élémentaires, comme le numéro de volume. La qualité de la numérisation (et donc on peut supposer celle de la recherche) est parfois totalement inadéquate. Les éditions proposées (à la recherche ou à la vente) sont, au mieux, regrettables. Étonnamment, cela me laisse penser que les techniciens de Google ont une vision plus romantique du livre que les bibliothécaires. Google Books considèrent les livres comme un entrepôt de sagesse à exploiter avec de nouveaux outils. Ils ne voient pas ce que les bibliothécaires savent : Les livres peuvent être des choses obtuses, obstinés et même odieuses. En général, ils ne se résignent pas à entrer sur une étagère standardisée, un scanner standardisé ou une ontologie standardisée. On ne peut non plus surmonter leurs contraintes en grattant le texte ou en développant des algorithmes. Sans doute ces stratégies sont utiles, mais en essayant de laisser de côté des contraintes vraiment simples (comme les volumes) ces stratégies sous-estiment le fait que les rigidités des livres sont en même temps des ressources qui précisent comment les auteurs et les éditeurs ont cherché à créer le contenu, le sens et la signification que Google cherche aujourd'hui à libérer. Même avec les meilleures technologies de recherche et de numérisation à sa disposition, il est imprudent d'ignorer les éléments livresque d'un livre. D'une façon plus générale, un transfert des artéfacts de communication complexes entre les générations de technologies est sûrement problématique et non automatique.

Finalement, considérant la transmission comme une assurance qualité, la question de la qualité dans le programme bibliothèque de Google Book nous rappelle que les formes nouvelles sont toujours susceptibles de parricide, détruisant dans le processus les ressources dont elles espèrent hériter. Cela reste problématique, par exemple, pour Google News. Dans leur offre gratuite d'actualités, cela risque de miner le flot entrant des sources sur la qualité desquelles Google News compte pour vivre. Cela est aussi vrai, à une moindre mesure, pour Google Books. Google compte ici sur l'assurance qualité des grandes bibliothèques qui collaborent au projet. Les bibliothèques de Harvard et de Standford ne voient pas leur réputation renforcées par la qualité douteuse de Tristram Shandy (note JMS :livre ayant servi à la démonstration de l'auteur), marquée à leur nom dans la base de données de Google. Et Tristram Shandy n'est pas le seul. Pour chaque page mal numérisée ou chaque livre mal catalogué, Google ternit non seulement sa propre réputation sur la qualité et la sophistication de sa technologie, mais aussi celle des institutions qui se sont alliées avec lui.(..)

Voilà des affirmations qui alimenteront sûrement les débats entre partisans et adversaires du projet.


Actu du 10-09-2008

Un des débats les plus intéressants a eu lieu sur le liste des historiens du livre SHARP-L entre P. Duguid et P. Leary, auteur de l'article Googling the Victorians (pdf) qui montre a contrario combien l'outil est utile pour les historiens. Le débat a été reproduit par P. Brandley dans un billet sur O'Reilly Radar sous le titre The Google exchange.


Mon intérêt est ailleurs, sur le fond de la question posée qui rappelle les réflexions de Roger et prennent ici une dimension économique que je n'avais pas encore perçue.

Le premier texte de Roger a fait ressortir trois dimensions indissociables pour définir un document que je traduirais aujourd'hui ainsi :

  • Anthropologique : Forme (Document = Support + Inscription)
  • Intellectuelle :Texte (Document = Code + représentation)
  • Sociale : Médium (Document = Mémoire + transaction)

ou sous forme d'un schéma :

La remarque de P. Duguid revient à dire que la transposition par Google d'un livre sous format numérique n'a pris en compte (et mal) que la dimension du texte, en s'appuyant sur sa valeur sociale construite par les bibliothèques et en oubliant la forme. On pourrait dire aussi qu'un livre ancien et prenant une valeur patrimoniale réduit l'importance du texte au profit de la forme ce qu'a oublié Google, spécialiste du traitement linguistique.

Une autre facette du problème est soulevée par l'auteur celui de la fidélité de la transposition qui pose la question de la très difficile définition du texte. Celle-ci est traité cette fois dans le deuxième texte de Roger, qui se demande notamment comment définir les invariants documentaires à préserver dans une transposition de forme.

Le plus intéressant donc, pour moi, dans l'article de P. Duguid est de constater que les réflexions de Roger trouvent ici un écho pratique doublé enjeu économique. Ces difficultés ont, en effet d'après l'auteur, des conséquences sur la valeur de l'objet créé et en retour sur celle de la source.

dimanche 12 août 2007

Économie des réseaux sociaux (suite)

Voici quelques chiffres. Communiqué de eMarketer : Social Network Ad Spending Keeps Rising, AUGUST 13, 2007. Extraits (trad JMS) :

La semaine dernière News Corp. a annoncé que Fox Interactive Media avait eu sa première année bénéficiaire à partir d'un chiffre d'affaires de 550M USD (note JMS le bénéfice net serait de 10M). Avec une estimation de 80% des revenus en provenance de MySpace, cela traduit environ 440M de chiffre d'affaires pour le réseau pour l'année fiscale qui se termine fin juin. Presque tout provient de la publicité.

À ceux qui avaient des doutes sur MySpace, le président de News Corp. Rupert Mudoch a ajouté ceci durant le discours aux actionnaires : « Il n'y a pas si longtemps - 24 mois - beaucoup disait que nous nous embarquions dans une stupide aventure. Dans les 12 mois avant notre acquisition de MySpace, le site avait généré 23M de chiffre d'affaires. Aujourd'hui, sur la base de cette persévérance et ce succès, nous prévoyons que MySpace seule générera au-delà de 800M de chiffre d'affaires en 2008.

Je rappelle de R. Murdoch a acheté MySpace 580M USD à l'été 2005, chiffre à l'époque considéré comme démesuré et pourtant bien inférieur aux folles acquisitions qui ont suivi.

L'analyse d'eMarketer ajoute :

Alors, tout baigne pour les réseaux sociaux, pas vrai ? Pas tout à fait. Avec la publicité par bannière et par recherche qui représentent la grande part de ces revenus, que reste-t-il de la promesse originelle du social marketing : délivrer un message à LA personne et voir cette personne diffuser le message à son réseau ? Cette partie est encore en chantier.

Les professionnels du marketing sont encore à se demander comment mesurer l'efficacité des groupes.

Décidément beaucoup de monde se pose la même question.

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