Economie du document (Bloc-notes de Jean-Michel Salaün)

Repérage de données sur l'économie des documents dans un environnement numérique

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

mardi 17 avril 2007

Google et les bibliothèques en Europe : la position catalane

Ce billet a été rédigé par Céline Le Bail et Guillaume Cornille, étudiants de l'École de bibliothéconomie et des sciences de l'information dans le cadre du cours sur l'économie du document.

L’offre de numérisation de Google fait partie d’un projet plus vaste nommé Google Book Search (ex Google Print) dont le but est d’ « effectuer des recherches sur l'intégralité du texte des livres afin de trouver ceux qui vous intéressent et de découvrir où les acheter ou les emprunter. » L’entreprise californienne s’est donc lancée le défi de réunir l’ensemble des ouvrages de la planète afin de les rendre accessibles à tous. Elle viserait donc à répondre à ce vieux rêve, celui de rendre accessible gratuitement tous les savoirs du monde, constituant ainsi la nouvelle « Alexandrie virtuelle ». Pour ce faire, Google a adopté une double approche en approchant les deux acteurs essentiels : les éditeurs et les bibliothèques.

Ce billet ne concerne que le volet bibliothèque du projet.

La société a contacté le monde des bibliothèques afin de leur proposer la numérisation de leurs ouvrages pour leur mise en ligne. Un premier partenariat s’est crée avec cinq des plus grands établissements américains et anglais dès son lancement en 2004 : la New York Public Library ainsi que les bibliothèques des universités du Michigan, d’Harvard, de Standford (Etats-Unis) et l’université d'Oxford (Grande-Bretagne). Depuis, cinq bibliothèques catalanes (2005), la bibliothèque de l’université de Californie, du Wisconsin, de Virginie ainsi que la bibliothèque de Madrid (2006) et les bibliothèques des universités du Texas et de Princeton (janvier et février 2007) ont rejoint le projet. Enfin, la bibliothèque du Land de Bavière (Bayerishe Staatsbibliothek) vient en mars 2007 de rejoindre le projet de bibliothèque de Google. Il faut noter que la Bayerische Staatsbibliothek est l'une des plus grandes bibliothèques de recherche en Europe avec 9 millions d'ouvrages et 49 000 abonnements à des magazines. Elle possède aussi 89 000 manuscrits du Moyen-âge et 20 000 incunables, d'où son rôle prépondérant dans la conservation du patrimoine culturel écrit d'Allemagne.

Le nombre des bibliothèques adhérentes au projet de Google se porte désormais à dix-sept (mars 2007).

Le but est donc de numériser en quelques années près de 15 millions d’ouvrages (soit environ 4,5 milliards de pages). Selon le principe de la propriété intellectuelle après ajustement de la firme, seuls les ouvrages tombés dans le domaine public seront disponibles dans leur intégralité, pour les autres, seuls des extraits ou informations générales sont accessibles.

Le but de Google est de travailler en collaboration avec les bibliothèques pour rendre accessible le patrimoine écrit mais également, selon leur présentation, pour la conception d’un « catalogue virtuel complet de tous les livres et dans toutes les langues, dans lequel les internautes pourront effectuer des recherches. Par le biais de ce catalogue, nous souhaitons aider les internautes à découvrir de nouveaux livres et les éditeurs à trouver de nouveaux lecteurs. »

Ce projet a provoqué de vives réactions dans le monde des bibliothèques avec, en chef de file, le président de la BNF, Jean-Noël Jeanneney. Toute une réflexion sur la manière de contrer, tout du moins ralentir le projet, s'est développée en Europe. On trouvera sur le blog du BBF une actualisation du débat européen.

Pourtant, les bibliothèques espagnoles et catalanes ont été séduites par le projet et ont accepté l'offre de Google. Qu’en est-t-il alors du débat ?

Pourquoi cette position contradictoire ? Nous avons pu interroger un bibliothécaire, Sergi Font, de la bibliothèque nationale de Catalogne. Voilà le compte-rendu de l’entrevue faite via Internet le 14 février 2007 :

Comme vous le savez, la Bibliothèque de Catalogne et 4 autres bibliothèques catalanes (Abadia de Montserrat, Ateneu Barcelonès, Centre Excursionista de Catalunya et le Séminari de Barcelona) ont adhéré au projet Google pour les bibliothèques. Il y a différentes raisons qui peuvent expliquer ce fait. Dans les cinq bibliothèques se trouvent déposés des fonds patrimoniaux assez nombreux et importants que nous devons préserver pour qu’ils soient à la disposition des citoyens. La numérisation nous permettra de disposer d’une copie de sécurité en plus de celle de diffusion, disponible pour n’importe quelle personne quel que soit le lieu où elle se trouve. De plus, les budgets des différentes bibliothèques ne permettent pas, pour le moment, d’aborder une politique de numérisation massive ou alors quelques actions ponctuelles.

Lors d’une rencontre sur la documentation, un représentant de Google s’est entretenu avec un responsable de la Bibliothèque de Catalogne. Pendant la conversation le thème de la numérisation est apparu et tant Google que la Bibliothèque se sont montrés disposer à arriver à un accord pour collaborer au projet Google bibliothèque.

L’accord sous-entend la numérisation de tous les livres tombés dans le domaine public, les livres sous droit d’auteur, qui se trouvent dans des conditions adéquates de préservation pour la manipulation sans risque pendant le processus de numérisation.

En ce moment nous en sommes à la phase de préparation du projet et il est difficile de quantifier les livres qui vont être numérisés et combien de temps cela va prendre.

Finalement, pour la Bibliothèque de Catalogne et les quatre autres bibliothèques catalanes l’adhésion au projet Google suppose une opportunité pour préserver leurs documents et garantir l’accès à leurs contenus à travers la toile, ou depuis le portail de Google ou de leurs propres catalogues. Un autre bénéfice évident sera de doter d’une meilleure visibilité sur Internet de la culture catalane.

La situation politique actuelle de la Catalogne tend à expliquer la position de sa bibliothèque nationale. Dotée d’une culture et d’une histoire riche, la Catalogne est une province relativement indépendante et qui tente de plus en plus à se démarquer de Madrid et du reste de l’Espagne. L’adhésion au projet Google peut-être perçue comme une position symbolique, un « pied de nez » à Madrid. En effet, un des arguments clés soulevés par S. Font est la mise en valeur de la langue et de la culture catalane et de sa diffusion sur Internet. Les autres arguments sont d’ordre généraux et se retrouvent chez les principales bibliothèques qui ont adhéré au projet : problème de financement, copie de sécurité et la mise à disposition pour les citoyens ou les chercheurs de fonds patrimoniaux importants.

Google a désormais mis le pied en Europe. Même s’il n’a pas approché de grandes bibliothèques nationales, Google a séduit des bibliothèques avec des fonds importants. Son implantation est progressive et a débuté par des territoires ou provinces dont la position au sein de leur pays n’est pas négligeable. L’échiquier est en place, l’Europe se mobilise mais l’appétit de Google est grand et sans « faim ». Jusqu’où ira-t-il ?

E-science = redocumentarisation de la science

Si certains doutent encore de l'importance de l'e-science pour les bibliothèques ou de celle de la redocumentarisation en cours dans la science. La lecture de ce petit dossier sur l'expérience britannique devrait les convaincre.

Le programme e-science au Royaume-Uni, dossier réalisé par l'ambassade de France à Londres, mars 2007. 10p.

Introduction :

Il y a moins de 50 ans, l'avancée de la recherche se faisait par la collecte d'informations dans les bibliothèques, par un réseau de communication restreint à l'entourage proche des chercheurs et par des calculs essentiellement faits à la main ou à la règle à calcul. L'arrivée de l'informatique et de l'ordinateur a provoqué un énorme bond en avant dans la gestion de l'information. Plus besoin d'avoir d'immenses étagères pour stocker ses informations, plus besoin de passer du temps devant un monticule de brochures. Un seul ordinateur est capable de stocker davantage d'information qu'une bibliothèque « papier ». Les calculs se font instantanément ; l'ordinateur est capable d'effectuer plusieurs milliers d'opérations simples à la seconde.

A partir des années 70, Internet a provoqué un second bond pour la diffusion de l'information, offrant la possibilité aux chercheurs de mettre en commun leurs résultats et de communiquer plus facilement avec leurs collègues du monde entier. Cependant, les informations sont regroupées sous différents formats et leur qualité et leur pérennité ne sont pas garanties. Les chercheurs travaillent dans diverses universités et entreprises, dans diverses régions et différents pays. Les logiciels utilisés sont souvent incompatibles. Il leur est donc parfois difficile de communiquer directement entre eux.

L'e-Science est aujourd'hui à la veille de révolutionner la recherche et les échanges d'informations. (..)

Conclusion :

Le Royaume-Uni a déjà relevé beaucoup de défis pour la mise en place de l'e-Science et plusieurs avancées scientifiques ont été effectuées grâce à elle. Cependant, nous ne sommes qu'au début d'une nouvelle technologie qui devrait révolutionner le monde scientifique. Plusieurs pays du monde entier ont suivi l'initiative du Grid. En 2002, le ministère de l'éduction chinois a lancé le projet ChinaGrid. Les Allemands ont débuté en 2005 le DGrid dans une initiative pour l'e-Science. Au Japon, la National Research Grid Initiative (NAGERI) a été mise en place par le Ministère de l'éducation, de la culture, des sports, de la science et technologie. En 2003, la France lance le projet Grid5000 avec neuf centres répartis dans tout le pays ; ce projet devrait aboutir en 2008. Aux Etats-Unis, l'initiative pour le US TeraGrid a été lancée en 2000. La Commission Européenne est, depuis mars 2006, à la deuxième phase du projet Enabling Grids for e-Science in Europe lancé en 2004.

Le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont été les pionniers d'une nouvelle technologie qui devrait bouleverser le monde de la science dans les prochaines années.

Repéré par Prosper.

dimanche 01 avril 2007

L'avenir des BU en 10 points

L'Association of College and Research Libraries (ACRL) a réalisé une enquête dans la littérature et auprès de professionnels pour repérer les dix points les plus importants pour l'avenir des bibliothèques universitaires. Voici le résultat (trad JMS) :

  1. L'accent sera de plus en plus mis sur la numérisation de collections, la conservation d'archives numériques, l'amélioration des méthodes de stockage et de recherche de données.
  2. Les compétences des bibliothécaires devront continuer d'évoluer pour s'adapter aux besoins et attentes changeantes des populations desservies (étudiants et universitaires).
  3. Les étudiants et les universitaires exigeront un accès aux services de plus en plus rapide et large.
  4. Les débats sur la propriété intellectuelle vont se multiplier à l'université.
  5. La demande de technologie pour les services va s'accroitre et exigera des ressources financières supplémentaires.
  6. Les études supérieures seront de plus en plus considérées comme une activité commerciale.
  7. Les étudiants se considèreront de plus en plus comme des consommateurs attendant des équipements et des services de qualité.
  8. La formation à distance sera de plus en plus courante, mais coexistera avec la formation traditionnelle, sans la menacer.
  9. Le libre accès à l'information de la recherche financée sur fonds publics continuera à croitre.
  10. La préservation des données privées restera un problème important pour la bibliothéconomie.

On peut aussi commenter chacune des affirmations ici.

Personnellement, je suis assez d'accord avec le constat pour en vivre déjà bien des prémisses, ce qui ne signifie pas que toutes ces perspectives me réjouissent.

repéré par P. Suber

dimanche 25 mars 2007

Où sont les biblioblogues québécois ?

La biblioblogosphère francophone s'organise pas à pas. On trouvera ici et deux agrégateurs qui regroupent quelques uns des blogues tenus par des bibliothécaires ou des universitaires en SI. Il s'agit encore de versions de travail incomplètes.

En les parcourant, j'ai été frappé par l'absence de références québécoises. Peut-être s'agit-il simplement d'une méconnaissance ou d'un oubli. Les outils ayant été construits par des Français. Mais en regardant dans mon propre agrégateur, je n'ai trouvé que :

Olivier Charbonneau et le tout récent blogue des étudiants de l'EBSI.

Du côté des SI (à vrai dire plutôt des experts marketing) proche de mes problématiques, j'ai aussi : Éric Baillargeon Martin Lessard

Je ne sais si je dois m'inquiéter de ma propre méconnaissance de la toile québécoise ou de l'absence des professionnels québécois du document sur la toile. Merci d'avance si vous avez des suggestions de réponse.

Actualisation au fur et à mesure des signalements dans les commentaires (en remerciant les contributeurs) :

Et pour les outils de coordination :

jeudi 22 mars 2007

Europeana : ouverture du site et départ des deux présidents

Donc à la veille du Salon du livre de Paris, le prototype de la Bibliothèque numérique Europeana est maintenant officiellement présenté. En attendant des tests plus professionnels, on trouvera ici une première évaluation. Ceux que le feuilleton du projet, plus français que réellement européen, intéresse, trouveront ici tous les épisodes.

La seule vraie nouvelle de ce dernier est la non-reconduction de Jean-Noël Jeanneney à la présidence de la BNF. Atteint par la limite d'âge, il lui aurait fallu un décret du président de la République pour rester en poste, qui lui a été refusé. L'ensemble du projet de bibliothèque numérique avait cette perspective en horizon. Maintenant que les deux présidents qui l'ont porté quittent leur poste en avril, ma perplexité reste entière. Attendons donc de connaître les noms des futurs, mais qui d'autre s'est jusqu'ici avancé dans le monde politique ou culturel français pour défendre une bibliothèque numérique européenne ?

- page 13 de 16 -