Economie du document (Bloc-notes de Jean-Michel Salaün)

Repérage de données sur l'économie des documents dans un environnement numérique

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dimanche 06 mai 2007

Conservation, oeuvres orphelines et épuisées, vers un oeucuménisme européen ?

Le rapport d'une douzaine de pages sur les aspects juridiques de la conservation numérique, l'accès aux oeuvres orphelines (dont on ne retrouve plus les ayant-droits) et aux oeuvres épuisées d'un groupe de travail mis en place à la demande de la Commission européenne vient d'être mis en ligne. Le groupe de travail comprenait des représentants des éditeurs, des auteurs, des bibliothèques et des musées et ceci aussi bien pour l'écrit que pour l'audiovisuel. Cet œcuménisme en fait déjà un document d'exception. Le rapport comprend aussi dans une annexe un modèle de contrat pour l'accès aux copies numériques de livres épuisés.

i2010: Digital Libraries High Level Expert Group – Copyright Subgroup, Report on Digital Preservation, Orphan Works, and Out-of-Print Works. Selected Implementation Issues, 18 av 2007, Rapport, Annexe

Extraits :

Ordre du jour du groupe :

What are the key IPR challenges? What different actions and arrangements could be undertaken jointly by stakeholders to reduce tensions surrounding copyrights? Is there a need to harmonise at Community level exceptions and limitations that relate to libraries, archives, museums? What are possible ways for facilitating the clearance of rights for cultural institutions?

(..)

For rightholders the governing principles are:

  • Respect for copyright and related rights, including moral rights of creators and performers of copyrighted works;
  • Digitisation and use within the premises of libraries should take place with rightholders’ consent or be based on statutory exception;
  • Online availability should take place with rightholders’ consent;
  • Rightholders’ consent means in principle rights clearance, which should be based on individual or collective licensing or a combination thereof.

For libraries, archives and museums the governing principles are:

  • for these institutions it is important to have legal certainty in their activities;
  • Access means either within the premises of libraries, archives and museums or online availability;
  • For born-digital works or works digitised by rightholders this means getting permissions for access to works;
  • For analogue works this means getting permissions for large scale digitisation and access;
  • Legal certainty presupposes a solution for so-called orphan works: unknown or non locatable rightholders and their works.

(..)

The Copyright Subgroup has aimed to identify and work out practical solutions to specific needs and expectations indicated by libraries that would assist them in satisfying their user requirements for adequate access to information. All stakeholder representatives concerned agreed that this should be done in a way that does not interfere with the copyright holders’ interest in commercialising their works. Following these requirements and current needs specified by the libraries, the model licence is at present limited to allowing the library to digitise and provide access to out-of-print works to users through closed networks. It is not limited in respect of territory, but the library may not provide access through open networks.

samedi 21 avril 2007

Gros bras et petites têtes de l'État français

C'est tellement gros que l'on pourrait croire à un tardif poisson d'avril ! Mais la menace paraît bien réelle. Pendant que les Français sont suspendus aux résultats des élections, les administrations ministérielles se croient tout permis, ou plutôt croient pouvoir tout surveiller.

Un article du président du GESTE (Groupement des éditeurs de sites en ligne, qui regroupe la quasi-totalité des gros joueurs du Web français) dans Le Monde est intitulé : L'Etat veut-il tuer Internet en France ?

Lecture édifiante qui devrait faire réfléchir plus d'un électeur français internaute.

jeudi 19 avril 2007

Beaumarchais has been ?

Une des difficultés actuelles sur le modèle d'affaires du Web-média est la rémunération des contenus, et, en amont, celle des auteurs et des artistes. La référence à Beaumarchais fait sens si on se rappelle qu'il fut en France à la pointe du combat des auteurs contre les propriétaires de théâtre et qu'il a fondé en 1777 la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques (SACD, toujours en place et très active dans les polémiques actuelles), en réaction contre les rémunérations que lui versait la Comédie française pour Le Barbier de Séville.

Ainsi, lors d'un entretien avec l'avocat Maxence Abdelli, l'Atelier pose la question :

Et si Beaumarchais avait connu Internet, comment pensez-vous qu'il aurait réagi?

M.A : Aurait-il été inquiet de la question de la rémunération des auteurs sur Internet? Aurait-il salué l’arrivée en force du « public » des internautes? Difficile à dire...

D'une manière plus générale, toute une partie de la profession prône encore l'application du droit d'auteur de façon assez stricte sur les réseaux de communication électronique. Beaumarchais en aurait peut-être fait partie ! Or, je crois qu'aujourd'hui il est nécessaire de trouver un équilibre. Tout en protégeant les auteurs, c'est une évidence, il faut trouver un nouveau modèle alternatif de développement qui permette aux œuvres de circuler assez librement tout en rémunérant les auteurs.

Ce qui est fondamental dans le débat aujourd'hui, c'est que l'on ne peut pas se contenter de rémunérer les artistes avec de la publicité. Ce modèle porterait en effet trop préjudice aux artistes. En effet, il y a un certain manque de visibilité sur les recettes perçues par la publicité. Si un artiste met son œuvre sur un site qui ne génère pas beaucoup de publicité ou qui est peu fréquenté, il risque de dévaloriser son œuvre et il l'aura communiquée au public sans avoir de rémunération conséquente. La rémunération des artistes doit être proportionnelle aux recettes engendrées. Ces recettes peuvent être générées soit par la vente de supports physiques, soit par celle de titres numériques. Il y a donc une petite marge de manœuvre à exploiter à ce niveau-là. Ce qu'il faut donc retenir du droit applicable aujourd'hui, c'est le principe d'une rémunération, et d'une rémunération équitable. Mais si, sur Internet, ces principes sont pleinement applicables pour les plates-formes de vente en ligne, pour les artistes qui ont déjà intégré un catalogue, on a encore un gros problème de visibilité sur les rémunérations que l'on peut verser aux artistes ne participant à aucun catalogue.

La réponse témoigne de l'attachement des auteurs au modèle éditorial, qui leur fournit une rémunération proportionnelle aux ventes des artefacts sur lesquels est fixé une copie de leur oeuvre. Mais, cette posture n'est pas conforme au combat de Beaumarchais qui visait le théâtre et non l'édition. Les industries culturelles se sont évidemment depuis transformées. En particulier, la radio-télévision, issue du modèle théâtral, a explosé et trouvé les moyens de rémunérer les artistes. Il reste à trouver l'équivalent pour le Web-média. Je ne doute pas qu'on y arrive après sûrement bien des batailles. Si je suis sûr que Beaumarchais y aurait participé, je pense qu'il ne se serait pas trouvé du même côté que bien des auteurs aujourd'hui qui confondent leurs intérêts avec ceux du lobby éditorial, dont il n'est pas évident que l'organisation soit la plus efficace pour défendre la création.

samedi 31 mars 2007

Gouvernance de l'Internet : US/Chine, Documents/Objets

À lire absolument un entretien (avec qui ? je ne sais cela n'est pas indiqué dans la version en ligne !) très clair, précis et percutant, sur les enjeux politiques et commerciaux de la gouvernance d'Internet publié dans le Monde. Il souligne en particulier les divergences entre les US et la Chine ou entre l'internet traditionel et celui des objets :

Qui contrôlera demain Internet ? LE MONDE | 31.03.07 | 13h55 Propos recueillis par Stéphane Foucart

Extraits :

La Chine a essayé à plusieurs reprises, de s'éloigner des standards techniques de l'Internet. Ces tentatives auraient pu aboutir à la fragmentation ou à la balkanisation du réseau, c'est-à-dire la formation d'"îlots" peu connectés entre eux. Mais la Chine peut-elle encore se permettre de créer un Réseau incompatible avec le reste du monde ? Elle a besoin des innovations de l'Ouest pour alimenter une croissance qui est devenue cruciale pour la survie politique du régime. Si l'Iran a décidé récemment de réduire le débit des accès Internet de ses citoyens afin de freiner les échanges avec l'Occident, de telles mesures ne pourraient plus être adoptées en Chine. (..)

Si le premier milliard d'internautes s'est connecté au Réseau par le biais des ordinateurs, le deuxième milliard sera connecté à Internet par le biais de toutes sortes d'objets, qu'il s'agisse des produits alimentaires, des vêtements ou des livres... à mesure que les codes-barres présents sur les objets manufacturés seront remplacés par des puces sans contact (ou puces RFID, comme la puce qui équipe la carte Navigo des Franciliens).

Le consortium mondial de gestion des codes-barres, EPC Global, a choisi un système qui permettra à terme de stocker sur Internet toutes les informations relatives à la vie de ces objets (lieu de fabrication, acheminement, contrôles effectués, etc.). Ce changement vers un "Internet des objets" sera effectué pour des raisons logistiques, d'économie et de traçabilité. Cela générera d'importantes économies pour les distributeurs. (..)

En effet, s'il devient possible de connaître les mouvements de tous les objets et personnes sur l'ensemble de la planète, le gouvernement qui contrôlera ce système détiendra un pouvoir qu'aucun gouvernement n'a jusqu'ici rêvé de posséder.

Réflexions d'escalier le 01-04-2007 :

1) Le vieux débat du NOMIC (Nouvel Ordre Mondial de l'Information et de la Communication) est réactivé sur le Web. Il se décline différemment puisque le réseau des réseaux se joue des frontières, mais il est toujours aussi ambigu entre d'une part une tentation très forte des États pour contrôler la circulation des messages et, de l'autre, une dynamique de marché qui favorise certains joueurs. Au moment où la convention sur la diversité culturelle est entrée en vigueur, il serait utile de mieux tirer les leçons des batailles antérieures. On trouvera une bonne introduction sur cette question dans : Alegre Alan, O'Siochru Sean, Droits de la communication, in Enjeux de mots, C&F Éditions, 2005.

2) La montée de l'Internet des objets risque de séparer plus radicalement l'utilisation du réseau en une partie gestion de service et une partie Web-média dont j'essaie de souligner les contours, billet après billet dans ce blog.

Actu du 4 avril : Donc il s'agit de Bernard Benhamou. Pour plus de précisions voir les commentaires ;-)

mercredi 21 mars 2007

La diversité culturelle oubliée

Je n'ai retrouvé dans mes fils RSS, sauf chez Olivier Charbonneau honneur à lui, aucune allusion à l'entrée en vigueur le 18 mars 2007 de la convention de l'UNESCO sur la diversité culturelle. Pourtant, il s'agit d'un acte juridique international très fort, même s'il est sans doute encore trop tôt pour en mesurer la portée réelle.

Citons la tribune du Vice-président exécutif de la Coalition canadienne pour la diversité culturelle dans le Devoir du 17-18 mars :

L'originalité de la Convention de l'UNESCO, c'est qu'on y affirme formellement, pour la première fois dans l'histoire du droit international, le «droit souverain des États de conserver, d'adopter et de mettre en oeuvre les politiques et mesures qu'ils jugent appropriées pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles sur leur territoire».

C'est aussi la reconnaissance de «la nature spécifique des activités, biens et services culturels en tant que porteurs d'identité, de valeurs et de sens», qui de ce fait «ne doivent donc pas être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale».

Faut-il croire que le Web n'est pas un support d'expression culturelle ? J'ai surtout le sentiment que les ego-observateurs du Web-média ne voient dans celui-ci que le marché ou encore "l'intelligence des foules", deux versants d'une même médaille d'une pensée ultra-libérale très hostile au rôle des États. Est-ce bien raisonnable ?

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