Economie du document (Bloc-notes de Jean-Michel Salaün)

Repérage de données sur l'économie des documents dans un environnement numérique

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lundi 05 mars 2012

AI pour l'éducation : "l'apprentissage connecté"

H. Jenkins relaye une intéressante déclaration de la fondation Mc Arthur aux US sur l'apprentissage connecté. La déclaration est à l'initiative de chercheurs en éducation qui mènent des projets dans ce domaine depuis longtemps. Sans le dire explicitement, les auteurs raisonnent comme des architectes de l'information avec, ce que j'apprécie particulièrement, un fort souci déontologique. Ce réseau devrait être une source d'inspiration pour le domaine "éducation" de notre master futur.

Voici le tout début de la déclaration qui mérite d'être lue en entier (trad JMS) :

L'apprentissage connecté : réinventer l'expérience éducative à l'âge de l'information

Nous vivons un moment historique dans la transformation et le recadrage de la création et du partage des connaissances, dans la vie sociale, politique et économique et dans une connectivité généralisée. Il y a un large accord sur notre besoin de nouveaux modèles éducatifs adaptés à ce moment historique, et pas simplement de nouveaux modèles pour l'école, mais des visions entièrement nouvelles mieux adaptées à la complexité, la connectivité et la rapidité croissantes de notre nouvelle société de la connaissance. Heureusement, nous sommes également en mesure d'exploiter les mêmes technologies et les mêmes processus sociaux qui ont conduit à ces transformations pour proposer à la nouvelle génération un apprentissage qui lui ouvrira les portes d'une réussite scolaire, des possibilités de travail et d'un engagement civique.

Précisément, nous avons maintenant la possibilité de réinventer où, quand et comment l'apprentissage a lieu ; de responsabiliser et motiver les jeunes à acquérir des connaissances et développer des expertises à un rythme, à un niveau et par un chemin qui tienne compte de leurs intérets et capacités particulières ; et de construire les innovations s'appuyant sur un spectre de plus en plus large d'institutions capables de supporter une gamme d'expériences d'apprentissage pour les jeunes inimaginables il y a seulement 15 ans.

Nous proposons une nouvelle approche pour l'apprentissage : l'apprentissage connecté, qui s'appuie sur la recherche, des théories éprouvées et les meilleurs standards, mais qui est aussi construite pour exploiter le nouvel environnement social et numérique des médias et le coeur des questions ci-dessous :

  • Que signifie penser l'éducation comme la responsabilité d'un réseau de personnes et d'institutions, comprenant les écoles, les bibliothèques, les musées et les communautés en ligne ?
  • Que signifie penser l'éducation comme un accompagnement d'une participation active des jeunes à la vie publique, ce qui inclut l'engagement civique, et les activités intellectuelles, sociales, récréatives et pertinentes pour une carrère à venir ?
  • Comment pouvons-nous profiter des nouvelles formes de configurations intergénérationnelles qui sont apparues dans lesquelles les jeunes et les adultes se retrouvent pour travailler, se mobiliser, partager, apprendre et réaliser ensemble ?
  • Que signifierait réunir dans cet effort un éventail d'acteurs plus large que ce que nous pensons traditionnellement comme des institutions scolaires et civiques ? (..)

La suite est ici et on trouvera plus d'infos sur le projet et

mardi 17 janvier 2012

Les femmes lisent (des livres), les hommes écrivent (sur le web)

Le DEPS a publié une très intéressante synthèse de ses enquêtes sur les pratiques culturelles, reprenant notamment l'analyse générationnelle déjà initiée :

Olivier Donnat, « Pratiques culturelles, 1973-2008, Dynamiques générationnelles et pesanteurs sociales », Culture études DEPS Ministère de la Culture et de la Communication, nᵒ. 7: 2011. Pdf

Il est utile de la compléter avec l'étude de l'Insee sur la gestion du temps des Français :

Layla Ricroch et Benoit Roumier, « Depuis 11 ans, moins de tâches ménagères, plus d’Internet », INSEE Première, nᵒ. 1377 (novembre 2011).

Forte des données régulièrement collectées, l'étude d'O. Donnat est très documentée et confirme bien des tendances esquissées dans une précédente publication sur la baisse tendancielle de la lecture traditionnelle, la montée de l'audiovisuel et le succès de la musique enregistrée, ainsi que le rôle particulier des sorties et des pratiques amateurs. Mais intégrant les données de 2008, elle permet de souligner ce que l'on pressentait : le poids des pratiques numériques sur les plus récentes générations. Tout cela conduit O. Donnat à écrire :

Aussi l’évolution des pratiques culturelles doit-elle être appréciée d’un double point de vue difficilement conciliable : le premier souligne la permanence d’une forte stratification sociale des pratiques culturelles et confirme la pertinence des schémas théoriques articulés autour de la notion de capital culturel, tandis que le second met en lumière la force des mutations générationnelles, rappelant que les formes de la domination culturelle, loin d’être éternelles, se renouvellent en liaison avec les transformations de la structure sociale, des conditions d’accès à la culture et des modes d’expression artistique.

Pourtant la leçon la plus nouvelle de mon point de vue, et la plus dérangeante si on la met en regard avec les pratiques actuelles sur le web, est l'accentuation et l'orientation des différences sexuées dans les pratiques culturelles et tout particulièrement pour le livre.

Les femmes ont aujourd’hui un engagement plus fort dans le monde du livre que les hommes dans tous les milieux sociaux, à la fois parce qu’elles sont plus nombreuses à lire quand elles sont jeunes et qu’elles résistent mieux à la diminution du rythme de lecture qui accompagne l’avancée en âge. Cela se traduit par exemple sur ce schéma.



Livre_HF-DEPS

Pour la fréquentation des bibliothèques, le constat va dans le même sens. Les jeunes femmes sont les principales contributrices de la progression constatée à l’échelle nationale. (..) Plus nombreuses à suivre des études et plus souvent en charge des activités culturelles périscolaires des enfants quand elles sont mères de famille, elles ont largement profité, au moins jusqu’à la fin des années 1990, des effets d’offre et de la diversification des services proposés (ouverture aux supports audiovisuels, développement de l’édition pour la jeunesse, etc.).

Bib_HF-DEPS.bmp

Du côté de l'Insee, on constate : Le temps domestique quotidien, resté stable chez les hommes, a diminué chez les femmes, en particulier chez celles qui n’ont pas d’emploi (une demi-heure de moins par jour depuis 1999). Cette évolution confirme et prolonge la baisse observée entre 1986 et 1999. L’écart entre les hommes et les femmes s’est donc réduit, mais demeure : il est d’une heure et demie par jour.

Et surtout, on observe un écart important en faveur des hommes pour le temps passé devant l'ordinateur (hors travail), quel que soit l'âge :

Insee-Temps-Ecran.jpg

Maintenant si l'on s'intéresse aux internautes les plus actifs sur le web, la situation devient caricaturale. Parmi de nombreux exemples (communauté du libre, bibliosphère, entreprises du NASDAQ, etc.) prenons celui de Wikipédia. Selon une enquête réalisée en 2009 par la fondation, 68% des lecteurs et surtout 87% des contributeurs sont des hommes !

Une interprétation déprimante du croisement de ces tendances soulignerait que les unes investissent les activités de distinction délaissées par les autres qui s'installent sur les lieux de pouvoir de demain... Provocation de ma part sans doute, et pourtant, est-ce un hasard si la question, rarement posée, reste sans réponse ? Il est troublant de lire sur Wikipédia à la rubrique Le genre et Wikipédia, sous l'affirmation Les femmes sont minoritaires dans la communauté Wikipédia :

wikipedia-femmes-18-01-2012.bmp

9 août 2012

Infographic: Wikipedia's Gender Gap Exposed

mercredi 14 septembre 2011

Réseaux sociaux : colloque et séminaire à Lyon

Dans le cadre de l'IXXI de l'ENS-Lyon, plusieurs initiatives sont prises cet automne autour des réseaux sociaux et de l'architecture de l'information. Un séminaire est proposé certains vendredis (voir l'annonce de la première séance en fin de billet) et un colloque international est organisé les 12-13 décembre.

Colloque

Social networks are an old topic in social sciences. As soon as 1934, J. L. Moreno analyzed social networks of girls that evaded school and envisioned sociometry as a kind of physics, complete with its own “social atoms” and its laws of “social gravitation”. Since the 90′s, there has been an explosion of publications, involving many different disciplines : computer science, management, physics, political science… However, collaborations between these disciplines are the exception rather than the rule.

In this 2-day workshop, we will present different approaches to social networks, both empirical and reflexive. The scope is to understand the differences, the convergences and try to establish new links. Is the availability of data at an unprecedented detail going to change sociology? We will also think about the social and political impact of the recent explosion of Internet social networks and the gathering of digital data on our personal activities. In other words : What are we learning about the social world? With which tools? What kind of world are we making with this digital frenzy?

Voici le pré-programme du colloque :

12 décembre

accueil café : 10h-11h

11h-13h : Refonder la sociologie avec les données

  • Bruno Latour (Sciences Po, Paris) : 1h
  • Gianluca Manzo (Sorbonne, Paris) : 30min
  • Alain Barrat (Physique, Marseille) : 30min

15h-18h : La politique des données

  • Thomas Berns (ULB) 1h
  • Eric Fleury (ENS Lyon) 30min
  • Gwendal Le Grand (CNIL, France, à confirmer) Europe contre Google/Facebook 45m
  • Dominique Cardon (Orange, France) 45m

13 décembre

9h – 13h : Topologie et sociologie des réseaux

  • David Stark (Columbia Univ) 1h
  • Bertrand Jouve (Lyon2) 30 min
  • Pierre Mercklé (ENS de Lyon) 30 min
  • Vincent Blondel (Informatique, Univ Louvain) 1h

L'entrée est gratuite sur inscription préalable. Le nombre de places est limité par la taille de la salle. On peut s'inscrire dès à présent ici. Lieu du colloque : Ecole Normale Supérieure, 15 parvis René Descartes, salle F08, 69007 Lyon

Séminaire

La première séance du séminaire est le vendredi 23 sept de 13h30 à 17h30. Elle se tiendra à l'IXXI (plan d'accès)

Réseaux sociaux et Représentation de soi

Animateur : Pierre Mercklé, maître de conférences à l'ENS-Lyon, auteur de Sociologie des réseaux sociaux, col. Repères éd. La Découverte.

Intervenants :

Antonio CASILLI, maître de conférences en Digital Humanities à TELECOM ParisTech, auteur de Les Liaisons numériques : vers une nouvelle sociabilité ? (Seuil, 2010).

Alexandre COUTANT, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Université de Franche-Comté, coordinateur du numéro de la revue Hermès : « Ces réseaux numériques dits sociaux » (n° 59, avril 2011, avec Thomas Stenger),

Julie DENOUEL, maître de conférences en sciences du langage, UMR Praxiling, Université Paul Valéry Montpellier III, coordinatrice avec Fabien Granjon, de Communiquer à l’ère numérique. Regards croisés sur la sociologie des usages (Presse de l’Ecole des Mines, 2011).

vendredi 08 juillet 2011

Pourquoi l'anglais domine

C'est tout expliqué de façon lumineuse ci-dessous par mon collègue du Collegium de Lyon et de l'université de Chicago, Salikoko Mufwene :

samedi 04 juin 2011

Usages mobiles et pentagone

Fred Cavazza attire l'attention (ici) sur une étude de Nielsen sur l'utilisation des terminaux mobiles (). L’enquête a été menée auprès de près de 12.000 possesseurs de terminaux pour savoir comment et où ils utilisaient leur appareil. Voici donc le résultat publié résumé en deux images, la première concerne les lieux d'utilisation, la seconde les temps relatifs d'utilisation des terminaux :

Connected-devices-1.jpg

connected-devices-2.jpg

L'intérêt de l'étude pour moi est de montrer la nette différence d'utilisation des terminaux entre eux, même s'ils permettent tous de naviguer sur le web, et leur rapport avec les médias plus anciens. Les tablettes sont plutôt corrélées à la télévision, on les utilise principalement en regardant le «petit» écran dont elles sont sans doute un adjuvant documentaire. Les liseuses préfèrent la position allongée, comme les livres évidemment. Quant aux téléphones 3G, ils sont utilisés partout, y compris dans les transports ou en faisant les courses. Ces derniers ne sont pas sans rapport avec l'utilisation ancienne de la presse.

Alors on peut reprendre l'organisation des médias en pentagone et leur classement par rapport à la gestion du temps et la tarification (pour suivre le raisonnement, il est indispensable d'avoir intégré le module 4 du cours) et leur adjoindre le terminal mobile le plus proche. Tout se passe alors comme si l'usage des terminaux se raccrochait à l'organisation traditionnelle des médias. On se trouve alors très éloigné d'une convergence qui tendrait vers un uni- ou méta-média, même si le numérique autorise des passages d'un média à l'autre.

Devt-pentagone.jpg

J'ai ajouté un quatrième terminal, l'ordinateur portable, que j'ai corrélé avec le web-média dont la configuration se cherche aujourd'hui. Il y aurait beaucoup à disserter sur ces résultats et l'interprétation esquissée ci-dessus. Disons seulement aujourd'hui que le numérique ne bouleverse pas autant qu'on le dit souvent l'ordre des médias, mais qu'il participe activement à leur transformation.

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