Economie du document (Bloc-notes de Jean-Michel Salaün)

Repérage de données sur l'économie des documents dans un environnement numérique

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

lundi 03 mars 2008

Coopération faible et bibliothéconomie

Dominique Cardon et son équipe ont fourni, je crois, le chaînon qui me manquait dans la proposition sur le Web-média. Je prétends, en effet, qu'une part de l'explication de l'explosion du Web se trouve dans la configuration progressive d'un nouveau média de masse qui nait sous nos yeux.

Ce média se positionne entre deux modèles classiques : celui de la télévision et celui de la bibliothèque. Mais le raisonnement a un défaut car les deux modèles en question sont antagoniques. L'un relève de la diffusion, l'autre de l'accès. On trouvera un résumé de cette proposition ici.

Les travaux suivants permettent, je crois, d'avancer.

Aguiton (Christophe), Cardon (Dominique), The Strength of Weak Cooperation : An attempt to Understand the Meaning of Web2.0, Communications & Strategies, n°65, 1st quarter 2007, p. 51-65. Pdf. Résumé en français sur InternetActu Html.

The Stength of Weak cooperation: A Case Study on Flickr, Christophe Prieur, Dominique Cardon, Jean-Samuel Beuscart, Nicolas Pissard, Pascal Pons Pdf. Résumé en français sur Suivez le geek Html

À la lecture de ces différents papiers, j'ai été frappé par deux éléments paradoxaux : d'une part, une grande similitude entre les comportements notés et ceux que l'on constate dans les bibliothèques, et, d'autre part, l'inversion du flux communicationnel des contributeurs du Web 2.0 par rapport aux bibliothécaires. En effet, l'objectif ici est l'affirmation de soi par l'accumulation d'informations (créées ou récoltées) que l'on offre, autrement dit le moteur de la création dans les industries culturelles, plutôt que l'enrichissement de soi par la récolte d'informations extérieures que l'on mutualise, qui soutend lui l'accumulation bibliothéconomique.

Je crois donc que l'on a peut-être ici la clé du rapport entre le fameux crowdsourcing du Web 2.0 qui construit les sites de partage du Web 2.0 et la collecte de documents qui alimente les bibliothèques et donc aussi le pont entre le modèle de la radio-télévision, au flot ininterrompu, et celui de la bibliothèque, aux collections pérennes.

Départ du fil chez A. Gunthert.

mercredi 20 février 2008

(complété) Web 2.0 : accumulation primitive du capital documentaire..?

Lu chez Michel Roland (ici) :

Flickr est une application phare du Web 2.0, en particulier parce qu’elle pousse l’utilisateur de base à enrichir ses contenus de métadonnées et à les rendre ainsi accessible à la communauté. Dans un premier temps nous (utilisateurs de base) l’avons fait sans arrière-pensée: on commence avec quelques photos, on met des étiquettes pour les retrouver facilement, aussi pour jouer avec l’outil et puis on est tellement content de l’interface qu’on met de plus en plus de photos, qu’on met à peu près toutes ses photos dans Flickr et on les tague, les organise d’autant plus facilement qu’on dispose d’outils épatants pour ce faire (l’organizer et puis la World Map), on continue sur la lancée jusqu’à ce qu’on se trouve avec des milliers de photographies et des dizaines d’heures de travail dans l’équipement documentaire dedites sans moyen de rapatrier ce travail chez soi au moment où le partenaire à qui on l’avait confié change de mains et menace de changer de politique. Et on se retrouve ainsi avec le désagréable soupçon d’avoir été piégé.

Pour mes jeunes lecteurs d'une autre génération, le titre du billet fait référence à ce texte fondateur  :

Ainsi donc ce qui gît au fond de l'accumulation primitive du capital, au fond de sa genèse historique, c'est l'expropriation du producteur immédiat, c'est la dissolution de la propriété fondée sur le travail personnel de son possesseur.

La propriété privée, comme antithèse de la propriété collective, n’existe que là où les instruments et les autres conditions extérieures du travail appartiennent à des particuliers. Mais selon que ceux-ci sont les travailleurs ou les non-travailleurs, la propriété privée change de face. Les formes infiniment nuancées qu'elle affecte à première vue ne font que réfléchir les états intermédiaires entre ces deux extrêmes.

Marx K., Le Capital Livre I : XXII.

Actu du 21 février 2008

Pour atténuer le caractère trop elliptique du billet, voici un petit développement. Le terme accumulation primitive du capital documentaire a, dans mon esprit, une double dimension : celle du capital et celle de ses caractéristiques documentaires.

L'une est dans la suite de l'analyse de Marx avec l'appropriation du résultat du travail, l'exploitation. Certains diraient le «pronétariat».. Cela mériterait une réflexion plus forte que ce que j'ai déjà lu, car, d'une part, la pensée originelle l'était et, d'autre part, nous sommes dans une époque très éloignées de celle du bon Karl.

Mais l'autre dimension est bibliothéconomique. Les origines d'un très grand nombre de bibliothèques et de centres de documentation se trouvent dans une accumulation primitive réalisée, pacifiquement ou non, par des individus qui mutualisent les documents qu'ils ont réunis pour leur intérêt personnel pour passer à la dimension d'un modèle médiatique. La plupart des BU des universités d'Amérique du nord ont été fondées grâce aux dons de bibliophiles (ce qui a permis l'essor de ces universités). En France, les confiscations révolutionnaires des collections religieuses ont joué un rôle très important pour le démarrage des bibliothèques publiques. Plus ponctuellement dans les organisations, les centres de documentation ont été très souvent fondés tout simplement parce que les individus n'arrivaient plus à gérer leur documentation individuelle accumulée.

Le Web 2.0, à mon avis puise dans ces deux logiques. Dans son versant commercial, il y a, à l'évidence, une appropriation du travail d'autrui. Dans son versant médiatique, il y a constitution de collections (y compris de métadonnées) en vue d'une accumulation primitive. Il est bien possible que, passé ce stade, les pratiques et relations se modifient, ce qui justifie le terme «primitive». La citation de M. Roland, parmi bien d'autres, est peut-être le signal d'une prise de conscience et d'un changement dans les relations. Mais le capital accumulé restera comme point de départ.

Un exemple différent et spectaculaire de cette accumulation primitive est évidemment la numérisation des livres des bibliothèques par Google.

mercredi 23 janvier 2008

De l'avenir des blogues..;-)

Le blogue est-il soluble dans l'ego et vice-versa ? Démonstration par l'exemple ;-)

Une vidéo (ici, signalée par F. Muet) et une illustration chez M. Lessard (, surtout ne pas manquer les commentaires).

mardi 04 décembre 2007

Dérapage

Éric baillargeon, un des plus fins analystes québécois du Web, montre comment il s'est laissé fasciné et abusé par Facebook (ici).

Extraits :

Facebook admet que même si vous n'étiez pas en session avec lui lors de vos périgrinations sur la toile, les actions et informations que vous faites ailleurs peuvent revenir chez Facebook et ce même si vous aviez interdit les applications externes de votre compte de Facebook !!! (..)

J'ai, comme la plupart des utilisateurs de Facebook, déversé mon carnet d'adresses de courriel dans Facebook lors de mon inscription. Je dois dire qu'à ma première inscription, j'ai interrompu ce processus en me disant "ouille, merde, quelle connerie" et ensuite, après avoir fait des recherches sans avoir vu de cas problème, j'ai tout de même procédé.

Maintenant la question qui tue ? Est-que Facebook surveille aussi tous mes contacts web en dehors de Facebook comme il le fait avec Beacon ? Pourquoi pas !

jeudi 22 novembre 2007

Les zoos sociaux

Après avoir lu le billet d'Olivier qui se demande si l'homme n'est pas devenu un document depuis qu'il est documentarisé par les réseaux sociaux, je me suis rappelé la réflexion de Suzanne Briet sur l'antilope :

L’antilope qui court dans les plaines d’Afrique ne peut être considérée comme un document… Mais si elle est capturée… et devient un objet d’études, on la considère alors comme un document. Elle devient une preuve physique.

L'antilope devient un document quand elle est dans un zoo, alors qu'elle n'est qu'elle même dans la jungle.. À méditer.

On trouvera une bonne présentation de Suzanne Briet et de son œuvre ici. Son livre Qu'est-ce que la documentation de 1951 est accessible en ligne dans sa version anglaise de Ron Day ici.

Il ne semble plus être accessible en Français (hep, psitt, Pierre, tu as retiré ton exemplaire ?)

Actu du 18 déc 2007 Pour le livre de S. Briet en ligne, voir les commentaires. Pour la suite des réflexions d'Olivier sur le sujet, c'est .

- page 9 de 15 -