Economie du document (Bloc-notes de Jean-Michel Salaün)

Repérage de données sur l'économie des documents dans un environnement numérique

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mercredi 17 mars 2010

Sens et contresens sur la lecture des jeunes

Très jolie provocation sur l'incohérence des discours actuels sur le livre et joli hommage à la typographie.

Repéré par l'excellent Étreintes digitales ici.

mardi 26 janvier 2010

La guerre du Web (nouvel episode : le netEmpire du milieu contre-attaque)

En rédigeant ce billet, j'ai été frappé par la parenté entre l'histoire du Web qui s'écrit sous nos yeux et la saga des Star Wars. Ce n'est évidemment pas un hasard, l'imaginaire des créateurs se nourrit de nos rêves et de nos utopies et vice-versa. On sait ce que la construction de l'internet doit à l'utopie californienne. Je laisse à d'autres plus savants que moi en sémiologie poursuivre cette piste, mais je suis sûr que Larry Page ou Serge Brin se rêvent déjà en Jedi ;-)

Ideogramme.TN__.jpg

Je ne reviens pas sur la discussion en cours. On trouvera sur le site de l'Atelier (ici) une bonne chronique du développement de l'internet en Chine.

La partie qui se joue aujourd'hui entre la Chine et les États-Unis est passionnante et sans doute décisive pour bien des équilibres planétaires : commerciaux, culturels, politiques et peut-être aussi militaires. Pour la comprendre correctement, il faut revenir un peu en arrière :

  • Google et d'autres gros de l'internet ont tenté avec un succès mitigé de s'implanter en Chine. Les raisons sont expliquées ici et .
  • L'État chinois a la volonté de faire évoluer sa société, tout en maintenant un contrôle étroit sur la communication. Il n'y a là rien de nouveau dans son histoire, mais l'internet est pour lui à la fois une formidable opportunité et un danger.
  • La crise financière a changé le rapport de force économique entre les USA et la Chine.

Hubert Guillaud (ici) vient de donner un éclairage intéressant sur le bras de fer qui se joue à présent entre Google-USA et l'État chinois. Il semble que ce dernier serait en passe de réussir son contrôle de l'internet via les DNS rédigées en idéogramme chinois. Dès lors, c'est tout un marché qui risque d'échapper à Google et aussi, au delà du contrôle politique qui agite beaucoup les commentateurs, c'est la mise en place potentielle d'un très puissant outil de protection commerciale via les réseaux sociaux, la publicité contextuelle et les sites de e-commerce.

Il est trop tôt pour proposer une vraie analyse. Mais voici quelques pistes qui montrent l'ampleur des questions posées :

Importance de l'écriture

J'ai déjà eu l'occasion de l'écrire. La vraie muraille de Chine contemporaine, c'est son écriture. L'écriture fait l'unité de la Chine, pourtant partagée en plusieurs langues. Mais elle reste inaccessible pour la quasi-totalité du reste du monde. Il est plus que symbolique que le champ de bataille soit aujourd'hui d'une part les moteurs de recherche dont la compétence est justement le traitement de la langue au travers de son écriture et d'autre part l'écriture des adresses. Il s'agit de la maîtrise de la faculté de nommer les choses et, au sens le plus fort, leur redocumentarisation.

Ainsi, nous assistons à la confrontation de deux mondes ou plutôt de deux humanités. Pour qui connait un peu la Chine, il n'y a pas vraiment de surprise. Reste à espérer que chacun puisse s'enrichir de la différence de l'autre. Mais cette partition est inégale. L'équivalent du mandarin chinois pour le monde occidental est l'écriture anglaise. Celle-là est beaucoup plus accessible et beaucoup plus répandue, y compris en Chine où l'on considère qu'il y a aujourd'hui plus d'étudiants anglophones qu'aux États-Unis mêmes.

Il reste au moins encore une écriture importante dans le monde qui n'utilise pas vraiment, me semble-t-il, l'internet comme outil de développement fort : l'arabe littéraire. Mais elle a trouvé un autre vecteur : le livre et la religion.

Retour des États et bipolarisation

On a eu tort de croire que la messe était dite pour les États et qu'ils ne pourraient plus contrôler un Internet devenu transnational. On reproche à la Chine de vouloir contrôler Internet, mais tous les États, avec leur culture propre, ont toujours cherché à contrôler les médias. Là encore, il est très significatif que ce contrôle passe par celui des moteurs et celui des adresses. C'est exactement comme dans la vie réelle : la circulation et les lieux.

Il est frappant de constater l'absence de l'Europe dans cette bataille. L'Europe est absente aussi bien au niveau industriel (aucun champion sur le Web) qu'au niveau politique (silence radio total pour le moment sur cet épisode). Ainsi il s'agit bien d'une bi-polarisation de chaque coté du Pacifique dont on verra à l'avenir quelle ampleur elle prendra.

Actu du 29 janvier

Voir les points de vue optimistes du président de l'ICANN (ici) et de T. Berners-Lee ().

Actu du 5 février 2010

Pour en rajouter dans le roman d'espionnage :

Piratage : la NSA pourrait venir en aide à Google... mais à quel prix ?, Numerama, 5 février 2010, ici et l'article du Washington Post ,

Actu du 10 mars 2010

Voir aussi cet article d'E. Scherer : Le web chinois, un énorme intranet ? ici

Actu du 13 mars 2010

Il semble que le départ de Google de Chine est imminent ici. Il devrait être suivi par celui d'eBay, une histoire différente mais qu'il faut sans doute aussi analyser comme une réplique sismique, une fois que l'on enlève le vernis politique là.

Actu du 30 avril 2010

Voir aussi ici l'AFP.

dimanche 06 septembre 2009

Google Book : l'État c'est moi

Nouvelle excellente initiative de Lionel Maurel qui a traduit un texte très éclairant de James Grimmelmann sur l'accord de Google avec les auteurs et éditeurs américains actuellement en procès suite à recours collectif bien paradoxal :

James Grimmelmann, “Google et l’armée des zombies orphelins” (Georgetown University Library, 2009), ici le texte original est .

Voici le dernier paragraphe :

Peut-être ce règlement aura-t-il quand même un effet positif pour la société : de bonnes choses sortent parfois des pratiques les plus corrompues. Mais nous devons bien être conscients que ce n’est pas de cette manière que les choses auraient dû se dérouler. Les parties ont atteint un résultat différent de celui que la société était en droit d’attendre. Peut-être notre système politique est-il trop grippé pour régler à la fois le problème de la recherche dans les livres et la question des œuvres orphelines ? Mais nous ne devrions pas pour autant renoncer à exiger mieux que cela ; nous ne pouvons pas nous contenter de baisser les bras en disant : « C’est toujours mieux que rien ».

On ne saurait mieux écrire que Google est en train de prendre des prérogatives régaliennes et que cela est dangereux pour la démocratie.

Actu du 8 septembre 2009

Voir aussi le communiqué en France de l'interassociation Archives, Bibliothèques Documentation (IABD), qui reprend un argumentaire comparable :

Non au Règlement Google Livres en France ici

Et cinq minutes plus tard :

Google renonce à inclure les ouvrages européens dans Google Livres, ZDNet ici

Ça brasse. Il se dessine de plus en plus nettement une différence de positions US/Europe.

samedi 29 août 2009

Les lecteurs des bibliothèques sous surveillance

Voici donc le second article signalé par Paulette Bernard :

Trina Magi, “A Content Analysis of Library Vendor Privacy Policies: Do They Meet Our Standards?” , à paraître dans College & Research Libraries. Pre-print

Le titre annonce clairement la couleur. Les bibliothèques aux États-Unis (et ailleurs) ont un grand sens de l'éthique. Un Code de l'éthique a été publié par l'American Library Association (ici). Parmi les éléments essentiels de ce dernier figure la confidentialité des lectures, dont on comprend facilement l'importance pour une démocratie. Les bibliothécaires américains ont mené plusieurs combats importants en ce sens, tout particulièrement ces dernières années contre le Patriot Act. L'auteure de l'article a d'ailleurs gagné un prix à cette occasion. Mais, fait-elle remarquer, il se pourrait bien qu'aujourd'hui par manque de vigilance, les bibliothécaires ne puissent plus assumer leurs devoirs d'anonymisation des lectures. Leurs fournisseurs en ligne ne sont pas tenus par le même sens des responsabilités. Ayant perdu la maîtrise des collections, les bibliothécaires n'ont plus la possibilité de contrôler l'éthique de leur utilisation.

Extraits de la conclusion de l'article (trad JMS) :

Cette recherche montre que la politique de protection des données privées des principaux fournisseurs de ressources en ligne des bibliothèques ne tient pas compte de nombreuses normes construites par les bibliothécaires et l'industrie de l'information sur la manipulation et la protection des informations sur les utilisateurs (..)

Il est aussi clair selon leur politique affichée que la plupart des fournisseurs ne suit pas le code d'éthique de l'ALA concernant la protection de la vie privée des utilisateurs et partage les informations sur les utilisateurs avec des tiers pour des raisons variées, certaines aussi vagues que « protéger le bien-être de la société commerciale». Ceci est particulièrement inquiétant dans la mesure où le gouvernement s'appuie sur les sociétés privées pour l'aider dans son effort de collectes de données. (..)

Les étudiants qui ont confiance dans les bibliothèques et dans leurs promesses de confidentialité peuvent être incités à divulguer facilement des informations personnelles pendant qu'ils utilisent les bases de données proposées par celles-ci. Si les bibliothécaires veulent rester en accord avec le Code d'Éthique et avec les principes qui font des bibliothèques des lieux particuliers pour des recherches libres et ouvertes, ils doivent examiner avec attention les politiques qui régissent ces bases de données, défendre la protection des données personnelles des utilisateurs et former ceux-ci qui ont mis toute leur confiance dans la bibliothèque.

J'ajouterai quelques éléments en résonance avec les préoccupations de ce blogue :

  • Au delà des bibliothèques, les universités devraient être beaucoup plus attentives à ces questions, en interne comme à l'externe. En interne, elles devraient aussi se doter de code d'éthique sur la non-divulgation des pratiques de lecture des étudiants, qui ne passent plus nécessairement aujourd'hui seulement par les bibliothèques. La tentation est forte, par exemple, pour un professeur de vérifier qui est allé lire les pages qu'il a conseillé dans son cours et mises en ligne sur le site particulier de ce dernier. En externe, la traçabilité autorise théoriquement des études scientométriques sur les lectures et non plus seulement sur les publications. Est-on vraiment sûr qu'il soit sain de surveiller qui lit quoi dans la science ?
  • Les bibliothèques, qui ont confié sans toujours trop réfléchir leurs collections à numériser à Google, ont dans le même élan autorisé cette firme à surveiller les lectures de ces collections. Ceci est clairement en violation avec leur code d'éthique. Ces interrogations commencent à poindre avec le débat sur l'accord en discussion avec les auteurs et les éditeurs aux US. On pourra consulter sur ce sujet et d'autres le compte rendu par Mark Liberman de tables rondes organisées récemment à Berkeley sur cet accord (ici).
  • Enfin, tout cela me conforte dans ma catégorisation des modèles de médias. Dans le modèle éditorial, le lecteur ne fait pas qu'acheter un objet, il achète aussi sa liberté de lecture. Il peut alors lire et faire lire sans demander la permission à personne, ni être surveillé par personne. Inversement, le Web-média fait «payer» sa pseudo-gratuité par un encadrement et une suveillance du lecteur qu'il monnaiera sur d'autres marchés. Pour approfondir cette dernière question voir les développements autour du pentagone (court, long)

Actu du 1 septembre 2009

Voir sur ce sujet le billet du blogue LibraryLaw du 28 août, repéré grâce à Calimaq :

How to negotiate with web 2.0 services for better terms of service - yes we can ici

lundi 24 août 2009

Sociétés de surveillance

Paulette Bernard, merci deux fois à elle, m'a signalé deux documents vraiment très éclairants sur la question de la gestion des données privées aux US. Je présente ici le premier et garde le second, qui concerne très directement les bibliothèques, pour un autre billet.

Joshua Gomez, Travis Pinnick, et Sahkan Soltani, KnowPrivacy (Berkeley, USA: School of Information, University of California, juin 1, 2009), Pdf.

Il y a aussi un site qui présente les mêmes éléments ()

Plusieurs enquêtes sont croisées : une analyse quantitative sur les mouchards (Web bug, en québécois «pixel invisible» déf), une autre sur les termes affichés sur les sites des politiques de confidentialité, une troisième sur les plaintes déposées par les internautes et enfin une analyse du contenu de la presse sur le sujet. Voici quelques extraits du résumé du rapport (trad JMS). Ils se passent, je crois, de commentaire :

Notre analyse des mouchards a montré qu'ils sont innombrables sur le web; cela est inquiétant car les utilisateurs sont peu susceptibles de connaître les mouchards, et qu'il manque de réel contrôle sur cette technologie de surveillance. Les 50 principaux sites web contenaient au moins un mouchard à un endroit dans le mois de l'enquête. Certains en avaient une centaine. Plus important encore fut l'ampleur de la couverture de surveillance de certaines sociétés. Plusieurs avaient un mouchard sur la majorité des 100 premiers sites. Google en particulier avait une large couverture. Il avait un mouchard sur 92 des 100 premiers sites, et sur 88% de l'ensemble compris dans l'échantillon de données de presque 400.000 domaines uniques.

Combined Google Trackers

Notre enquête sur les politiques de confidentialité affichées montre que la plupart des cinquante principaux sites webs disent récolter des informations sur leurs utilisateurs et s'en servir pour personnaliser les publicités. Au-delà, cependant, la plupart comprennent des informations peu claires (ou manquent d'information) sur la conservation des données, l'achat de données sur les utilisateurs provenant d'autres sources, ou le sort de ces données dans le cas d'une fusion de sociétés ou d'une faillite.

Le partage des informations est particulièrement problématique. Alors que la plupart des politiques indiquent que l'information ne sera pas diffusée à un tiers, beaucoup de ces sites permettent à un tiers de récupérer des données via des mouchards. (..)

La plupart des politiques indiquent que les informations peuvent être partagées avec des sociétés affiliées. (..) Pour avoir une impression générale du nombre de sociétés avec lesquelles chaque site web parmi les 50 premiers pouvaient potentiellement partager leur données selon leur politique, nous avons chercher leur société mère et compté leur nombre de filiales. Le nombre moyen de filiales était de 297 avec une médiane de 93. (..).

L'analyse qualitative des plaintes a suggéré que les utilisateurs étaient principalement préoccupés par une absence de contrôle sur les collections de données et sur la publicisation des données personnelles (..).

L'analyse des articles de journaux a montré que les utilisateurs étaient alertés sur le profilage des comportements et en général sur les questions relatives aux collections de données. Pourtant, la discussion de certaines pratiques était inexistante. Pratiquement aucune mention n'était faite sur les partages des données avec les sociétés affiliées ou sur l'utilisation de mouchards.

Libérez les données disait-il.. ici

Actu du 26 aout 2009

Repéré par J Futardo :

Balachander Krishnamurthy et Craig E. Wills, On the Leakage of Personally Identifiable Information Via Online Social Networks, SigComm Conference 2009. Pdf

Compte tenu du nombre de papiers sortant sur cette problématique, il est à prévoir des changements prochains.

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