En ces temps d'inquiétude financière, il est intéressant de relier quelques propos pour méditer un peu sur le passé et l'avenir. Les évènements actuels risquent en effet d'avoir d'importantes conséquences sur l'économie du document, tout particulièrement dans sa dimension géopolitique. Je ne commenterai pas plus avant, le lecteur pourra tirer lui-même quelques conclusions de la résonance entre ces trois citations :
Propos 1
Les pays émergents, la Chine en tête, sont les grands gagnants de la décennie. On assiste à un transfert de pouvoir économique, financier, politique et même technologique. Depuis cinq ans, la consommation aux Etats-Unis et en Europe (sauf en Allemagne) a été artificiellement gonflée par la bulle immobilière, qui n'aura abouti qu'à favoriser la rente, creuser les inégalités entre générations, fabriquer de la dette des ménages, du déficit extérieur tout en menaçant de faire imploser le système financier international. Cette bulle nous aura fait perdre beaucoup de temps. Désormais, les acquisitions d'actifs occidentaux par des fonds souverains ou des multinationales des pays émergents vont se multiplier. Bien sûr, ces derniers vont souffrir du ralentissement, mais ils devraient résister.
Entretien avec Jean-Pierre Petit, économiste chez Exane BNP Paribas "Nous sommes dans une situation de capitulation", Le Monde 10 oct 2008, ici.
Propos 2
Elles ont fait tout ce qu’elles ont pu pour nous faire croire qu’elles échapperaient à la crise… mais ça n’est plus possible. Les entreprises qui sont au coeur du dynamisme de San Francisco et de sa région morflent comme toutes les autres.
Même les actions de Google, Apple ou Cisco redécouvrent les lois de la pesanteur . Les capital-risqueurs se font la malle. Les investisseurs se cachent. Même les start-ups économes réduisent encore la voilure. Et si elles ne le font pas, elles risquent d’être très vite emportées par la tourmente.
"Silicon Valley n’est plus à l’abri" F. Pisani Transnet, le 8 oct 2008 là.
Propos 3
La Chine a démontré une capacité d’innovation à la fois stratégique et technologique remarquable pour contrer la libéralisation induite par le développement de l’Internet, dont elle a su tirer le plus grand profit économique. Le rapport d’Open Net Initiative (2005), qui a mené des tests de censure sur une longue période, montre qu’au fil des ans le filtrage est devenu plus sophistiqué, subtil et efficace. Profitant d’un potentiel économique exceptionnel, la Chine a pu acheter la coopération technologique des entreprises étrangères et ignorer les timides remontrances des démocraties occidentales sur le respect des droits de l’homme. Pour autant, la Chine continue de s’ouvrir au monde, plus vite que jamais, et le nombre d’internautes devrait continuer de croître de façon exponentielle dans les années à venir.
Il y a fort à parier que les autorités résisteront jusqu’au bout et trouveront des solutions aux défis techniques au fur et à mesure qu’ils se posent ; et que les dissidents trouveront à leur tour des moyens de les contourner. L’Internet présente ainsi le paradoxe d’être à la fois une force de démocratisation et un outil d’oppression, tout comme la mondialisation engendre aussi des replis territoriaux. La géographie, pas plus que la dictacture chinoise, n’a succombé au développement de l’Internet.
Conclusion de l'article de Fédérick Douzet, “Les frontières chinoises de l’Internet,” Hérodote, no. 125 (second trimestre 2007),là.
1+2+3 = le netEmpire du milieu